Depuis le mouvement de révolte des paysans, au début de l’année 2024, les différents gouvernements macronistes ont enchaîné les dispositions anti-écologiques pour satisfaire les tenants du productivisme.

Début 2024, le pays est secoué par une crise agricole d’ampleur. Les axes routiers sont bloqués par des paysans en colère, des préfectures de la France entière sont encerclées de paille ou de fumier, des bâtiments publics sont attaqués… Dans les cortèges de mécontents, on se désole de la vie chère, des traités de libre-échange, du manque de soutien de l’État pour les agriculteurs qui ont pris un chemin plus vertueux.
Un État protecteur plus que dérégulateur est attendu. Pour calmer cette colère vive, le tout nouveau premier ministre d’alors, Gabriel Attal, annonce, le 30 janvier 2024, ses intentions et celles de son camp. À rebours de toutes les exigences écologiques : « Supprimer des normes, c’est possible : vendredi dernier, j’ai annoncé la suppression de 10 normes nationales pour nos agriculteurs – et beaucoup d’autres suivront ! »
Pour cela, le gouvernement misait sur une certaine « loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture ». Annoncées dès septembre 2022, au tout début du second mandat d’Emmanuel Macron, ces intentions sont restées à l’état d’incantations creuses jusqu’au lendemain de la crise agricole.
Dépénalisation des atteintes aux espèces protégées
Ces secousses ont donc servi de coup d’accélérateur. Le 3 avril 2024, le projet de loi est déposé, mais ce n’est que la semaine dernière, le 22 février, qu’il a définitivement été adopté, après un long processus législatif composé de régressions. Au point d’être dénoncé comme une « catastrophe pour l’écologie » par les associations environnementales.
Au centre des reproches, on trouve un article bien précis : le 13. Sous le prétexte de vouloir « simplifier » l’exercice des activités agricoles, celui-ci sort du champ pénal les atteintes aux espaces de faune ou de flore protégés. Elles ne seront désormais sanctionnables que de 450 euros d’amende et uniquement si l’intentionnalité est démontrée. Contre trois ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende jusqu’alors.
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Autant « d’abandons extrêmement importants sur la protection de l’environnement et le respect de la biodiversité » dénoncés par André Chassaigne, président du groupe GDR à l’Assemblée nationale. « Avec cette loi, nous assistons à une contre-révolution culturelle, se désole Dominique Potier, député PS de Meurthe-et-Moselle. Elle supprime toute référence à l’agroécologie. C’est le retour du productivisme et du corporatisme. »
Et gare à qui voudra contester cette vision, réduit désormais à l’impuissance. En effet, l’article 15, de son côté, rend plus difficiles les recours des associations qui constatent des impacts négatifs sur l’environnement en réduisant les délais de procédures administratives pour certains projets. Ce qui, selon la Défenseure des droits, Claire Hédon, « porte atteinte au droit au recours » en donnant une « présomption d’urgence » aux projets hydrauliques ou d’élevage notamment.
Un texte qui n’est que le dernier épisode d’une année d’atteintes au combat écologique sous prétexte de défendre les agriculteurs. Très récemment, le premier ministre, François Bayrou, a braqué les agents de l’Office français de la biodiversité (OFB), chargé du respect de droit de l’environnement auprès des agriculteurs. « Quand les inspecteurs de la biodiversité viennent contrôler le fossé ou le point d’eau avec une arme à la ceinture, dans une ferme déjà mise à cran, c’est une humiliation, et c’est donc une faute », a-t-il affirmé.
Sabotage du contrôle de la réduction des pesticides
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En réponse, une grève partielle a été décrétée par l’intersyndicale qui a également formulé une demande d’excuses publiques. En vain. Une nouvelle mobilisation est prévue pour le 25 mars. Interpellé sur ce point dans les allées du Salon de l’agriculture par le média en ligne Vakita, Emmanuel Macron a répondu vouloir « entendre le message de beaucoup d’agriculteurs qui vivent très mal, qui ont des revenus faibles, et qui ne pouvaient plus accepter d’être pénalisés, d’être traités comme des délinquants ». Voilà qui ne devrait pas calmer leurs inquiétudes.
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Avant cela, l’exécutif s’était aussi distingué par un assouplissement du plan Écophyto, début 2024. S’il vise encore aujourd’hui à réduire de moitié l’usage de produits phytosanitaires d’ici à 2050, l’indicateur de référence permettant son suivi a été modifié.
Avec pour effet de saboter tout contrôle strict, selon les scientifiques spécialistes du sujet et les associations environnementales, pour qui ce changement est synonyme de « fin des efforts sur la réduction des pesticides » (NDLR de MAC: voir la carte des pesticides prés de chez vous). « L’agriculture est dépendante des pesticides, et plutôt que de l’aider à en sortir, le gouvernement laisse faire », se désolait, à l’époque, l’ONG WWF. Étrange vision d’avenir pour l’agriculture.
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