Ceux qui font la Fête de l’Humanité avant les autres

Arrivés parfois deux ou trois semaines avant le commun des visiteurs, les « bâtisseurs » bénévoles et militants communistes sont les architectes indispensables de la Fête de l’Humanité. Entre débrouille et camaraderie.

À l’ombre d’une impressionnante collection de fûts de bière et de provisions en tous genres, une femelle boxer se prélasse, étirant négligemment une patte. Elle s’appelle Luma, « presque comme le journal ». « Y a qu’elle qui ne bosse pas », rigole Didier. Marcel, moustache en bataille, le chef de troupe des militants PCF de la fédération de la Charente, 62 ans et retraité de l’éducation nationale, nous invite à faire le tour de son stand.

Découvrez le montage titanesque de cette ville éphémère.

Il faut en effet tout le détachement dont peuvent faire preuve les chiens pour ignorer le branle-bas de combat qui anime la Base 217, au cœur de l’Essonne, en vue de la Fête de l’Humanité de ce week-end. Au stand charentais, il y a ce qui est prêt (la cuisine « garantie sans ouvre-boîte ni conserve », le bar). Et ce qui demande encore à l’être ( « les douches, c’est pas encore ça, on n’a pas encore l’arrivée d’eau »). « C’est immense, il y a beaucoup de travail, des difficultés, mais ce changement de site nous fait du bien. Haut les cœurs, serrons-nous les coudes ! Soyons fiers de cette Fête ! »

Petite ville éphémère

En se promenant dans les allées désertes de la Base, on mesure le travail de titan requis pour que cette petite ville éphémère sorte de terre. Dans quelques jours, des centaines de milliers de visiteurs écriront une nouvelle page de l’histoire de la Fête de l’Humanité. Les monteurs bénévoles, eux, en ont largement entamé la préface. Comme chaque année, ils sont arrivés depuis une semaine, parfois deux ou trois. De la Charente, des Hauts-de-Seine, de la Côte-d’Or… Après l’incendie de Notre-Dame, Macron louait les Français, « peuple de bâtisseurs ». Ceux de l’Huma ont leurs propres cathédrales, la grand-messe est populaire, solidaire et festive.

Sans cette armée de bénévoles, pas de Fête. Car si les chapiteaux sont déjà plantés, il reste à installer les équipements, brancher les groupes électriques, assurer l’approvisionnement en eau, monter les banderoles et les pancartes, creuser les tranchées pour l’évacuation des sanitaires… Au Village du monde, qui accueillera militants et personnalités venus de tous les continents, les ouvriers du Livre montent 90 stands. « Les festivaliers ont trois jours de fête, nous deux semaines, c’est le pied », sourit Thierry. Le jeu en vaut la peine : « Quand, quelques mois après la Fête, vous apercevez un des responsables de stand kurde à la télévision, en train de combattre les forces islamistes à Kobané, c’est incroyable », se rappelle Xavier.

Côté charentais, on plastronne : « On dit que c’est quand la Charente arrive que la Fête de l’Huma commence ». En sa qualité de « stand pionnier », la fédération a, comme d’autres, la responsabilité d’assurer la restauration des autres bâtisseurs qui arrivent au fur et à mesure. Et il y a intérêt à avoir du stock. L’anecdote se refile entre bénévoles. Plus de vingt ans auparavant, un stand parisien aurait tellement bien fonctionné en amont, jour comme nuit, qu’il est resté fermé les trois jours de Fête, faute d’une goutte de vin ou d’une miche de pain à offrir au public. « C’est bon, on a de quoi voir venir », rassure Denis.

Ici, l’entraide prévaut

Les bâtisseurs de la Côte-d’Or passent régulièrement y faire un tour. Eux sont arrivés la veille. Jean-Marie, nuque longue et barbe grise, et Brice, pin’s Lénine épinglé sur sa casquette, bataillent avec une tractopelle pilotée par Julien, du staff de la Fête. Le sol du stand doit être aplani pour y poser le plancher, au risque d’avoir un curieux décor penché. « Ce n’était pas prévu mais une Fête de l’Huma sans galère n’en est pas vraiment une », s’amuse Jean-Marc. Électricien de profession, ce communiste dijonnais gère l’installation électrique et les éclairages du stand. Puis, sa tâche accomplie, il ira aider les camarades des allées d’à côté. Ici, l’entraide prévaut. La mécanique est bien rodée : les premiers installés aident les suivants dans leurs préparatifs et ainsi de suite. La solidarité en cascade. Le ruissellement pour de vrai. « C’est ce qui différencie la Fête des autres festivals, cet esprit d’équipe, où tout le monde met la main à la pâte, travaille ensemble, déconne, échange, débat », se réjouit Yann.

Pour retrouver toute la programmation de la Fête de l’Humanité 2022 : les concerts, les débats, les expositions… et toutes les informations utiles, c’est par ici !

Lui est retraité, mais énormément de bénévoles dépensent une partie de leurs congés pour bâtir la Fête de l’Humanité. Comme Romain, la trentaine : « Ça n’a pas de prix, je m’éclate. L’ambiance, l’atmosphère, la camaraderie, vous n’avez ça nulle part ailleurs ». Le Charentais fait partie des « bérégeots », une « confrérie » qui remet chaque année, la veille de la Fête, trois nouveaux bérets aux monteurs de stand qui ont « versé le plus leur sueur », et rejoindront à leurs tours les rangs de l’association. Vu le travail abattu, les aspirants ne manqueront pas.

La France évitera-t-elle les coupures cet hiver ?

Énergie Emmanuel Macron tient, ce vendredi, un conseil de défense énergétique pour répliquer aux craintes de pénuries de gaz et d’électricité dans les prochains mois. Syndicalistes et experts doutent de l’efficacité de cette mise en scène, et soulignent les carences de la politique tricolore.

Les réservesde gaz haut calorifiquequi alimentent la majeure partie du territoire françaisne sont pas suffisantes pour combler le manquede gaz russe importé.Sylvain CORDIER/GAMMA-RAPHO

Les réserves de gaz haut calorifique qui alimentent la majeure partie du territoire français ne sont pas suffisantes pour combler le manque de gaz russe importé.Sylvain CORDIER/GAMMA-RAPHO Sylvain CORDIER/JACANA

Emmanuel Macron n’attendait que ça : le dirigeant tricolore peut enfin rendosser son costume favori, celui du capitaine dans la tempête ou, plus exactement, du chef de guerre face à l’adversité. Le « conseil de défense » énergétique qui se tient ce vendredi (voir ci-contre) s’inscrit évidemment dans cette ambiance martiale. Il faut « nous préparer au scénario du pire », c’est-à-dire à l’interruption totale des livraisons de gaz de la Russie vers l’Europe pour tout l’hiver, prévient la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Mais pour l’instant, en dépit des roulements de tambour et des menaces de coupures de courant qu’il agite, l’exécutif se limite à faire « preuve de pédagogie », en espérant que les ménages et les entreprises limiteront d’eux-mêmes leur consommation d’énergie, en croisant les doigts aussi pour que les frimas contournent l’Hexagone cet automne et cet hiver. Cette stratégie évitera-t-elle des coupures dans les mois à venir ? Les experts que nous avons interrogés se disent plutôt inquiets. Continuer la lecture de La France évitera-t-elle les coupures cet hiver ?

Rentrée scolaire : les raisons d’un fiasco annoncé

« Un professeur devant chaque classe. » En creux, la promesse du ministre de l’Éducation nationale révèle la crise de recrutement du système scolaire. Celle-ci n’est elle-même qu’un signe marquant d’un mal plus profond, structurel, ancré dans les projets macroniens pour l’enseignement.

 

Emmanuel Macron l’a décrété : c’est « la fin de l’abondance ». On n’est jamais mieux servi que par soi-même. Dans les écoles et établissements scolaires, c’est sous le signe de la pénurie d’enseignants que 12 millions d’élèves et 1,2 million de personnels de l’éducation nationale font aujourd’hui leur rentrée. Une pénurie qui résulte des décisions du gouvernement lui-même et constitue un signe, le plus visible et le plus inquiétant, d’un système scolaire qui se trouve désormais, comme l’hôpital ou la justice, en état d’urgence. Continuer la lecture de Rentrée scolaire : les raisons d’un fiasco annoncé