La bataille contre les 1.607 heures imposées aux agents des collectivités locales légitimée par la décision du Conseil d’Etat (Fabien Roussel)

En acceptant de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portée notamment par Dénis Oztorun, Maire PCF de Bonneuil (94), avec d’autres maires du Val-de-Marne, le Conseil d’État reconnaît la légitimité de la bataille menée par des élus locaux contre l’application de la mesure inique des « 1.607 heures » imposée aux agents publics, dans le cadre de la Loi dite de modernisation de la Fonction Publique.

Avec les élus locaux et les parlementaires communistes, j’ai porté cette bataille, notamment dans le cadre de l’élection présidentielle. Car cette mesure, adoptée par la majorité présidentielle durant le précédent quinquennat, est une attaque contre la Fonction publique, les droits des salariés et le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Continuer la lecture de La bataille contre les 1.607 heures imposées aux agents des collectivités locales légitimée par la décision du Conseil d’Etat (Fabien Roussel)

Boris Cyrulnik, «l’arme de la dictature, c’est le conformisme»

Dans sa quête de compréhension des malheurs du monde, le neuropsychiatre de renom Boris Cyrulnik analyse la tentation confortable de céder au dangereux aveuglement de l’embrigadement et lui oppose la pensée guidée par l’expérience sensible et le questionnement, l’esprit libre de ceux qui creusent leur propre sillon. Brûlant d’actualité.

Le père de la résilience, concept surexploité à l’insu de son créateur, poursuit sa quête de vérité : comment donner un sens à l’insensé ?

Surtout connu pour avoir développé le concept de résilience, le neurologue et psychanalyste, qui, à 7 ans, a échappé à la mort que lui promettait une idéologie meurtrière, poursuit son exploration des mécanismes de la psychologie humaine. Dans son dernier ouvrage, « le Laboureur et les Mangeurs de vent », il tente d’expliquer les mécanismes qui conduisent certains à se repaître de rassurants discours totalitaires jusqu’à l’aveuglement, au meurtre ou au génocide, tandis que d’autres s’emploient à penser par eux-mêmes, portés vers l’heuristique et l’empathie.

Quand et comment vous est apparue la distinction entre ceux qui ont une pensée ancrée dans le réel et ceux qui adhèrent à des discours préfabriqués ?

Boris Cyrulnik

Neuropsychiatre

C’est un problème que je me pose depuis mon enfance. Je me demande pourquoi certains parmi nous peuvent avoir des idées complètement coupées de la réalité. J’ai subi la guerre de 1940 et j’ai connu celle d’Algérie. J’ai pu constater à chaque fois qu’il y a deux manières d’aborder ces crises majeures. On peut les comprendre parce que l’on connaît l’autre, on le rencontre, on débat avec lui. C’est ce qu’Hannah Arendt appelle le récit enraciné. Au contraire, on peut aussi adhérer à un récit coupé de la réalité sensible. C’est ce que j’appelle aujourd’hui le délire logique. Le mot « délire » se décompose ainsi : « de » privatif, qui signifie « sans », et « lira », qui est « le sillon creusé dans la terre ». Et j’ajoute « logique », puisqu’il s’agit en général de discours très cohérents et qu’il n’est pas nécessaire d’être psychotique pour être délirant. Continuer la lecture de Boris Cyrulnik, «l’arme de la dictature, c’est le conformisme»

Francia Márquez, candidate à la vice-présidence au nom des “ignorées” de Colombie

Nous vous avons présenté grâce à un article-poème de Cecilia Zamudio, l’amie colombienne, féministe et communiste l’espérance des Colombiens. Les résultats du premier tour confirment la vague qui monte dans ce continent et que portent les “rien”, les “ignorés”. Des résultats provisoires donnent largement en tête Gustavo PEREZ au nom de l’alliance de gauche avec sa vice-présidente dont nous vous présentons le portrait, elle s’appelle Francia. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

Selon des résultats officiels provisoires publiés dimanche soir, l’opposant de gauche Gustavo Petro a récolté plus de 40 % des voix lors du premier tour de la la présidentielle colombienne. Il affrontera au second tour l’indépendant et homme d’affaires Rodolfo Hernandez.

L’opposant de gauche Gustavo Petro est arrivé largement en tête du premier tour, dimanche 29 mai, de l’élection présidentielle en Colombie, et affrontera au second tour le 19 juin un candidat indépendant, Rodolfo Hernandez, selon les résultats officiels provisoires publiés en soirée.

Gustavo Petro cumule 40,33 % des voix, devant Rodolfo Hernandez (28,14 %), indiquent ces résultats donnés par le Registre national, en charge de l’organisation du scrutin, après le dépouillement de plus de 97 % des bulletins. Le candidat conservateur Federico Gutierrez, représentant la droite traditionnelle colombienne, est en troisième position avec 23,90 %.

À ses côté, candidate à la vice-présidence, l’Afro-Colombienne Francia Márquez dit représenter les “riens”, surtout des femmes. Témoignages de ces ignorées qui voteront pour elle. El País AméricaTraduit de l’espagnol

Le 15 mai 2022, Francia Márquez en campagne à Cali, dans le sud-ouest du pays.
Le 15 mai 2022, Francia Márquez en campagne à Cali, dans le sud-ouest du pays. PHOTO PAOLA MAFLA/AFP

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Urgences en péril : la carte des 120 hôpitaux concernés, les témoignages de soignants + Appel à manifester à Moissac

NDLR de MAC: Rassemblement mardi 31 devant le CHIC à Moissac à 18h00  (Communiqué de presse manif du 31 05 2022 )

À Bordeaux, Rennes ou encore Oloron-Sainte-Marie, rares sont les hôpitaux épargnés par la crise de ces services vitaux. Partout, bricolages et bouts de ficelle soutiennent l’édifice. Pour combien de temps ? La parole à celles et ceux qui sont encore et toujours en première ligne pour pallier le manque de moyens.

Tous les établissements publics sont désormais touchés. Face à cette situation, la CGT et neuf syndicats et collectifs appellent à une journée d’action nationale le 7 juin prochain. Rémi Dugne/La Montagne/MaxPPP

Tous les établissements publics sont désormais touchés. Face à cette situation, la CGT et neuf syndicats et collectifs appellent à une journée d’action nationale le 7 juin prochain. Rémi Dugne/La Montagne/MaxPPP PHOTOPQR/VOIX DU NORD/MAXPPP

Au moins 120 services d’urgence contraints de limiter leur activité en France. L’ampleur est inédite. Des hôpitaux de proximité aux CHU, tous les établissements publics sont désormais touchés. Face à cette situation, la ministre de la Santé, Brigitte Bourguignon, promet de nouvelles mesures avant cette saison estivale qui s’annonce chaotique.

La carte des services d'urgence en difficulté en France. Infographie Humanité

La carte des services d’urgence en difficulté en France. Infographie Humanité

Pour Mireille Stivala, secrétaire générale de la CGT santé et action sociale, il est plus que temps d’agir. « On se demande comment on va continuer à tenir avec les collègues qui démissionnent. Tant qu’il n’y aura pas d’augmentation significative des salaires et des recrutements massifs, ça continuera de se dégrader. » La CGT et neuf syndicats et collectifs appellent à une journée d’action nationale le 7 juin prochain. Continuer la lecture de Urgences en péril : la carte des 120 hôpitaux concernés, les témoignages de soignants + Appel à manifester à Moissac

Recrutement des enseignants : chronique d’une crise organisée

C’est un grand « décrochage » qui sonne l’alarme. La dernière session de concours des professeurs, désertée par les candidats, annonce des classes sans enseignants à la rentrée. L’éducation publique est un noble et dur métier que la Macronie démonétise par des salaires lamentables et une formation au rabais.

Un tel niveau d’imprévoyance laisse les syndicats d’enseignants perplexes. Malgré leurs nombreuses alertes, il est quasi certain que de nombreuses classes n’auront pas d’enseignant devant elles à la rentrée. En cause, la baisse sans précédent du nombre de candidats admissibles aux concours (donc avant les épreuves orales, qui décident des admissions définitives) que laissent apparaître les premiers résultats, publiés le 10 mai par le ministère. C’est en mathématiques que les chiffres sont les plus inquiétants : seulement 816 potentiels professeurs ont réussi l’écrit du concours, en attendant l’oral, quand 1 035 devaient être recrutés. En allemand, on ne trouve que 83 admissibles pour 215 postes. Sans connaître un déficit aussi criant, d’autres disciplines jusque-là moins atteintes affichent cette année un taux d’admissibilité à peine suffisant par rapport au nombre de postes ouverts. C’est le cas en sciences économiques et sociales, avec 175 admissibles pour 121 postes, ou en lettres, avec 720 pour 755 postes. Les chiffres des admis définitifs seront encore plus faibles, et c’est donc « plus d’un millier de postes dans le second degré, soit entre un poste sur cinq et un sur quatre, qui ne trouveront pas preneur », estime le site spécialisé le Café pédagogique. Continuer la lecture de Recrutement des enseignants : chronique d’une crise organisée

Alain Supiot : « Une société qui donne pour idéal à sa jeunesse de devenir millionnaire se condamne à la répétition des crises »

Le juriste, professeur émérite au Collège de France, publie la Justice au travail, ouvrage dans lequel il met en perspective historique cette grande question et analyse les évolutions en cours. Il présente, d’autre part, une nouvelle édition des Lettres persanes. Dans nos colonnes, il appelle à dépasser l’opposition entre justice distributive et justice recognitive, c’est-à-dire entre ce qu’on nomme aujourd’hui le « social » et le « sociétal ». Entretien.

Alain Supiot, juriste, professeur émérite au Collège de France. Hannah ASSOULINE/opale

Alain Supiot, juriste, professeur émérite au Collège de France. Hannah ASSOULINE/opale

Alain Supiot a occupé la chaire « État social et mondialisation : analyse juridique des solidarités » au Collège de France. Le professeur émérite a été membre, de 2016 à 2018, de la Commission mondiale sur l’avenir du travail. Ses travaux de juriste se sont principalement déployés sur deux terrains complémentaires : le droit social et la théorie du droit. Ses recherches en cours portent sur les mutations de l’État social dans le contexte de la globalisation.

Le titre de votre ouvrage, la Justice au travail (1), a, selon vous, une double signification : la « juste répartition du travail et de ses fruits » et « l’exigence de justice comme force historique ». Comment articulez-vous ces deux dimensions ?

La justice a souvent été conçue comme un ordre idéal et immuable auquel il conviendrait de se conformer. Mais c’est bien plutôt l’expérience historiquement changeante de l’injustice qui est première. C’est la misère ouvrière engendrée par l’essor du capitalisme industriel qui a suscité, au XIXe siècle, la volonté d’en comprendre les causes et d’en combattre l’extension. Cette expérience diffère de celle que peuvent avoir aujourd’hui les travailleurs sous plateforme ou les personnels de santé soumis au pilotage par indicateurs chiffrés. Continuer la lecture de Alain Supiot : « Une société qui donne pour idéal à sa jeunesse de devenir millionnaire se condamne à la répétition des crises »

Mégabassines : les raisons d’une bataille sur l’eau dans les Deux-Sèvres

Bassines Non Merci  No Bassaran !

La sécheresse précoce qui sévit ce mois de mai remet sur le devant de la scène les conflits liés à la gestion de l’eau. Celui dit des mégabassines, dans les Deux-Sèvres, révèle les failles d’un projet de territoire mal partagé. Explications.

Des CRS qui montent la garde au milieu des champs ; des gendarmes qui procèdent, fusil-mitrailleur à la main, aux contrôles à l’entrée des villages ; des manifestants verbalisés ; des installations d’irrigation sabotées ; quelques baffes échangées… Depuis quatre ans, la vallée de la Sèvre niortaise est le théâtre d’un conflit qui vire à la bataille rangée entre agriculteurs.

Cette querelle-là porte sur l’eau, et n’est déjà plus la première du genre. Du projet de barrage de Sivens, abandonné en 2014, au lac de Caussade, rempli sans autorisation dans le Lot-et-Garonne, les pugilats se multiplient au fur et à mesure que le réchauffement climatique fait sentir ses effets. Continuer la lecture de Mégabassines : les raisons d’une bataille sur l’eau dans les Deux-Sèvres

Roger Waters, « le capitalisme est un système corrompu, défaillant »

Musicien de légende à la conscience politique aiguisée, Roger Waters, inventeur d’un son nouveau, a cofondé en 1965 le groupe de rock Pink Floyd. Il n’a jamais fait mystère de ses engagements internationalistes, de ses combats pour la liberté, la paix, l’égalité.

Engagé pour la libération de la chanteuse kurde Nûdem Durak, Roger Waters avait fait les titres de nos pages en avril. On le retrouve avant son départ pour sa tournée mondiale «This Is Not a Drill». © Urban Zintel/LAIF-REA

Engagé pour la libération de la chanteuse kurde Nûdem Durak, Roger Waters avait fait les titres de nos pages en avril. On le retrouve avant son départ pour sa tournée mondiale «This Is Not a Drill». © Urban Zintel/LAIF-REA

Depuis son studio d’enregistrement à New York, à quelques semaines du début d’une tournée mondiale, Roger Waters, nous a offert un entretien au long cours. Le musicien, connu pour ses engagements internationalistes et ses combats anticapitalistes, nous fait partager ses réflexions sur le monde. Turquie, Ukraine, Palestine, dangers de la civilisation capitaliste, désinformation : aucun des sujets qui font ou défont l’actualité n’échappe à sa sagacité.

Vous vous êtes récemment engagé pour la libération d’une jeune chanteuse kurde condamnée en Turquie à dix-neuf ans de prison, Nûdem Durak . Comment avez-vous entendu parler d’elle ?

J’ai entendu parler d’elle par l’un de mes amis. Et j’ai été un peu choqué d’entendre l’histoire de cette jeune femme donc je me suis renseigné. Elle n’a pas pu se défendre lors de son procès, c’était un fait accompli. Elle est en prison depuis sept ans maintenant. Voilà comment tout a commencé. Continuer la lecture de Roger Waters, « le capitalisme est un système corrompu, défaillant »

L’État laisse Vallourec fermer le site de Saint-Saulve

L’industriel accélère sa stratégie de délocalisation vers le Brésil et l’Asie, envisage de supprimer 2 900 postes en Europe, dont 320 en France, et ferme une usine dans le Nord. Syndicats et élus locaux appellent le gouvernement à « intervenir ».

Le «rond-point de la colère», installé par les salariés du métallurgiste. © Pierre Rouanet/La Voix du Nord/MAXPPP

Le «rond-point de la colère», installé par les salariés du métallurgiste. © Pierre Rouanet/La Voix du Nord/MAXPPP

À peine arrivé, Philippe Guillemot, le PDG de Vallourec, à la tête du groupe depuis trois mois, applique à la lettre et en vitesse accélérée la règle à calcul fixée par les actionnaires majoritaires (38 %), les fonds d’investissement américains Apollo et SVP Global. « Ce même fonds a pompé Ascometal, dans les aciers spéciaux sans rien y injecter, laissant le groupe en grande difficulté, comme d’autres proies en France », rappelle la CGT. Lors de la présentation des comptes du groupe, au premier trimestre, le champion des tubes en acier sans soudure pour le secteur pétrolier et gazier a annoncé, mercredi soir, la suppression dans le monde de 2 900 emplois, la plupart en Allemagne (2 400), 70 en Écosse et 320 en France, dont 65 au siège de Meudon (Hauts-de-Seine), 100 à Aulnoye-Aymeries (Nord), 60 au centre de services de Valenciennes (Nord), mais aussi 104 dans son usine de Saint-Saulve (Nord), qui devra fermer. Continuer la lecture de L’État laisse Vallourec fermer le site de Saint-Saulve

Éducation. Les syndicats demandent des moyens à Élisabeth Borne 

Les syndicats de l’éducation n’attendent pas. Le 18 mai ils écrivent à la première ministre. « La situation pour la prochaine rentrée est inquiétante.

Avec la chute importante du nombre de présents aux concours de recrutement, : des personnels vont manquer pour la rentrée 2022. Ceci alors que celles et ceux en postes dans les écoles, les établissements et les services sont épuisés par les réformes à marche forcée du dernier quinquennat et inquiets des projets annoncés », écrivent ensemble 11 syndicats (FSU, UNSA Education, FNEC FP-FO, SGEN-CFDT, CGT Educ’action, SNALC, Sud Education, SNCL-FAEN, FO-EA, CGT Agri, SUD Rural Territoires) et la Fcpe.  » Il est nécessaire de mobiliser des moyens notamment en pérennisant partout où elles existent les listes complémentaires en y recourant en première intention. Il faut également dès maintenant renouveler les contractuels mobilisés pour assurer les remplacements cette année.

Dans l’immédiat, nous demandons un moratoire sur les suppressions de postes présentées dans les comités techniques… Au titre des priorités à engager dès le début du quinquennat, nous vous confirmons notre exigence d’une revalorisation ambitieuse des salaires pour tous les personnels non seulement pour compenser la perte de pouvoir d’achat depuis plusieurs années mais pour redonner de l’attractivité aux métiers des services publics d’Education, sans conditionnement à des tâches supplémentaires ».

Faire bloc semble être la bonne politique.

Le courrier