Le 49.3: une arme contre le peuple

Depuis qu’il existe, le 49.3 a déjà été utilisé plus de cent fois en France. Ces coups de force empêchant le vote des députés n’ont pas donné naissance à quelques mesurettes anecdotiques, mais bien à des réformes structurant notre quotidien.

Entre 1988 et 1991, le gouvernement Rocard aura dégainé le 49.3 à 28 reprises. Un record dans l’histoire de la Ve République. Eric Tschaen/REA
Crédit : Eric Tschaen/REA

Le 49.3 est souvent surnommé « l’arme nucléaire législative ». Il permet au gouvernement d’imposer une loi en se passant du vote des députés. Soit une bombe antidémocratique qui vient faire exploser le fonctionnement normal du Parlement. Clin d’œil révélateur ou facétieux de l’histoire, il s’avère que le tout premier 49.3 utilisé l’a été… afin de doter la France de la bombe atomique.

En 1960, Michel Debré, premier ministre et rédacteur de la Constitution de la Ve République, dégaine pour la première fois cet article afin de déployer un arsenal militaire de dissuasion nucléaire. Les députés, qui voulaient discuter davantage de l’ampleur de cet arsenal, de son rôle en pleine guerre froide, des dangers des essais nucléaires sur le territoire français, sont tout simplement privés de vote. Continuer la lecture de Le 49.3: une arme contre le peuple

Emmanuel Macron à la messe du pape : au Sénat, des discours totalement opposés sur la laïcité

Après l’annonce de la présence d’Emmanuel Macron à la messe célébrée par le pape à Marseille samedi prochain, les réactions à droite et à gauche sont aux antipodes : la gauche dénonce une entrave à la laïcité quand la droite y voit la confirmation des « racines judéo-chrétiennes » de la France. Les discours se confrontent, y compris au Sénat, où Pierre Ouzoulias, sénateur communiste des Hauts-de-Seine, et Stéphane Le Rudulier, sénateur LR des Bouches-du-Rhône, les traduisent par des propositions de loi.

Tout est parti de la participation annoncée d’Emmanuel Macron à la messe célébrée par le pape ce samedi, dans le stade Vélodrome à Marseille. Elle suscite de vives critiques à gauche, qui fustigent une entrave à la laïcité. C’est dans ce contexte que le sénateur LR des Bouches-du-Rhône Stéphane Le Rudulier s’exprime le 18 septembre sur X (ex-Twitter) sur le sujet : « Messe du pape à Marseille en présence du président Macron. Pour sortir de toute polémique et hypocrisie j’ai déposé avec 34 sénateurs une proposition de loi pour consacrer les racines judéo-chrétiennes de la France Assumons nos racines et notre héritage au grand jour ! ».

Quelques heures plus tard, le sénateur communiste des Hauts-de-Seine Pierre Ouzoulias lui répond : « Je souhaite que le président n’assiste pas à cette messe, au nom du principe de laïcité, consubstantiel de notre République laïque et sociale. Mieux, je propose de constitutionnaliser l’article 2 de la loi de 1905 afin d’acter une séparation totale ». Continuer la lecture de Emmanuel Macron à la messe du pape : au Sénat, des discours totalement opposés sur la laïcité

Débat: Édouard Philippe et Fabien Roussel, « deux projets très différents » pour la vie des gens (Vidéo)

Fabien Roussel et Édouard Philippe ont débattu dimanche à l’Agora de l’Humanité. Une confrontation entre deux visions de la société.

Édouard Philippe et Fabien Roussel en débat à l’Agora de la Fête de l’Humanité, dimanche 17 septembre 2023
© Lahcène Abib

 

Inflation, blocage des prix, salaires, réindustrialisation, retraites, 49.3, extrême droite… Le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, et l’ex-premier ministre et actuel maire du Havre, Édouard Philippe, se sont livrés à un véritable débat gauche-droite dimanche, lors de la 88e édition de la Fête de l’Humanité.

De plus en plus de Français peinent à se nourrir. Le gouvernement a annoncé des négociations sur les prix et une « conférence sociale » sur les bas salaires. Ces mesures vous paraissent-elles à la hauteur ? Continuer la lecture de Débat: Édouard Philippe et Fabien Roussel, « deux projets très différents » pour la vie des gens (Vidéo)

La fête de l’huma vue de loin : l’avancée et ce qu’elle appelle par Danielle Bleitrach

Ce qui s’est passé à la fête de l’Humanité et le positionnement de Fabien Roussel face à la NUPES et à la liste des élections européennes était l’étape indispensable non seulement pour le PCF, la gauche mais pour offrir une perspective politique à notre pays. S’émanciper de la NUPES et de ces “mouvements” qui privilégient le sociétal, finissent par approuver les politiques de l’OTAN et des marchés financiers à la Syriza, était indispensable, le faire en mettant en avant un programme et des propositions d’action contre l’inflation était encore mieux. Roussel a choisi enfin d’affronter politiquement le consensus autour de Macron mais cette orientation que nous approuvons doit être approfondie et l’essentiel reste d’avoir un parti avec des militants organisés et formés pour être plus que de simples distributeurs de tracts. Même si nous éprouvons quelque joie moqueuse à voir Melenchon dénoncer le caractère “insurrrectionnel” supposé du PCF après avoir suporté à peu près toutes les foucades du maître autoproclamé de la France isoumise, tout étant toléré à condition que cela serve l’image du chef, il ne faut surtout pas jouer le même jeu qui épuise vite, et pour cela il faut reconstruire le collectif partout et toujours.

Fabien Roussel a tenu un discours offensif ce samedi 16 septembre à la fête de l’Huma, justifiant notamment son appel à « envahir les préfectures » pour lutter contre l’inflation.

Le secrétaire national du PCF a également appelé la gauche à faire union pour les européennes 2024… autour de son parti et la liste menée par Léon Deffontaines. Les commentateurs l’ont tous noté : Fabien Roussel a assumé s’éloigner de la NUPES, un pari qui apparement est risqué à la veille des sénatoriales, en fait même dans ce contexte la LFI ne sert pas à grand chose.

Jean Luc Melenchon qui est entré dans une zone de désaveu assez comparable à celle de Macron, celui où “les mouvements” autour de leaders qui prétendent dépasser les clivages traditionnels en collant à des préoccupations définies par des sondages, une “modernité” qui vieillit vite, dans un temps où la vie devient de plus en plus difficile, s’est lancé dans un mauvais procès sur “l’appel à envahir les préfectures” en raison de l’inflation.

Fabien Roussel a eu le mérite tout à fait nouveau d’affronter toutes les hostilités dans une fête de l’humanité qui pourtant n’avait pas été conçue en sa faveur en assumant mieux que cela avait été fait lors du Congrès de Marseille une orientation qui était celle voulue par l’immense majorité des militants et qui correspond à l’opinion des couches populaires, même s’il reste tout à faire pour concrétiser. La faiblesse de Fabien Roussel était dans le compromis permanent avec “les liquidateurs”, il ne leur a laissé aucun espace dans cette fête. Dans son discours de ce samedi 16 septembre, le secrétaire national du PCF a assumé ses propos. Il l’a fait avec franchise à partir non de sa personne mais des idées, d’un programme et quand un groupe de “jeunes” de la NUPES a tenté de le provoquer, sans agressivité il leur a répondu  « C’est d’abord autour des idées que l’on doit se rassembler. Or, nous n’avons pas les mêmes, je le regrette. Nous n’avons pas les mêmes priorités pour la France », a-t-il déclaré dans des propos relayés par Franceinfo .

Les jeunes ne sont pas ignorés et la place qui leur est faite n’est pas négligeable mais pour le moment ils sont dans un collectif avec un programme: nouveau responsable des Jeunes communistes à la suite de Léon Deffontaines – devenu tête de liste du PCF aux Européennes – le toulousain Assan Lakehoul est formel : «Nous devons absolument être au plus près des préoccupations des Français qui sont dans la colère, des jeunes en particulier. En 2027, il faudra faire le poids face au RN». Or selon lui «pour le moment, Jordan Bardella et Marine Le Pen arrivent à parler à une génération que la gauche a perdue et qui oscille entre le RN ou l’abstention.»

Sur quelle base peut-on parler à la jeunesse ? En tous les cas pour Fabien Roussel cela reste sans démagogie et sur le fond, sur des préoccupations concrètes, non gadgétisées concernant la possibilité d’études, d’un emploi, d’un logement.

Vendredi dans les travées de la Fête, aux militants qu’il rencontre comme dans les débats qui vont émailler les trois jours, le député du Nord le dit et compte le faire savoir. Avec lui, pas question «de marcher à côté de militants qui crient ’tout le monde déteste la police’», même s’il dénonce «des violences et du racisme dans l’institution, mais pas de façon systémique». Il ne serait donc pas de la manifestation organisée le 23 septembre par les Insoumis contre les violences policières. Et puis avec lui encore, «pas de décroissance». Et puis «du nucléaire aussi»

Fabien Roussel cultive son indépendance et son envie d’être une voix alternative à la Nupes. « Le nombre de gens qui m’ont arrêté pendant les émeutes pour me dire « Ouf, quelqu’un de gauche parle comme nous ». Ça m’encourage ! », a-t-il expliqué à la presse vendredi, rapporte l’AFP.

Roussel a eu l’habileté de prendre appui sur les spécificités du PCF dans les solutions concrètes pour notre pays. Ainsi en est-il du dossier nucléaire face à une majorité de socialistes, aux écologistes et aux Insoumis… «Le nucléaire, dit Roussel, j’en fais le sujet central de la reconstruction de la France, de notre industrie et de notre lutte en faveur du climat». Il le dit samedi dans son grand discours en fin de matinée. Et il le répéte dimanche dans un débat en début d’après-midi avec l’ancien Premier ministre Édouard Philippe dans un débat d’idée droite et gauche dans l’application de cette orientation . Car si l’un et l’autre défendent cette énergie, Roussel lui, veut «sortir du marché spéculatif de l’énergie».Or selon lui, «Edouard Philippe est prêt à sacrifier l’avantage énergétique français pour préserver le couple franco-Allemand». «Tout accepter des Allemands au nom de notre histoire et du pacte, assure Roussel, c’est prendre le risque d’un bond en arrière qui ouvre la porte à l’extrême-droite». La hausse du prix de l’électricité est en effet pour lui, «un véritable déclencheur de crise majeure».

Le PCF, tout comme le PS et EELV, ont depuis quelque temps acté leur refus d’élaborer une liste commune pour les élections européennes. Sur scène ce samedi, Fabien Roussel a fait le service après-vente de la liste communiste, menée par Léon Deffontaines« La liste d’union elle est là, elle est à votre disposition. Venez ! », lance-t-il.

Face à une fête de l’humanité qui avait été conçue pas nécessairement pour être celle du PCF, Fabien Roussel a eu la grande habileté de refuser un match provocateur avec Jean Luc Melenchon, il s’est contenté d’affirmer être trop occupé et de hausser les épaules face au rappel des propos que Jean-Luc Mélenchon a tancé vendredi le communiste, lors d’un débat dans l’émission Backseat diffusée sur Twitch, à propos de son appel « à envahir les préfectures », en raison de l’inflation. « Jamais un chef ne devrait appeler à des actions d’un tel niveau de violence sans consulter personne », a estimé le triple candidat à la présidentielle.

« Il faudrait que je m’excuse d’appeler à des mobilisations devant les préfectures alors qu’il y a aujourd’hui un tremblement de terre social dans notre pays ? », a lancé Fabien Roussel ce samedi. Il a aussi proposé de « participer personnellement à une opération Robin des bois » pour passer en heures creuses la fourniture d’électricité « d’une maternité, d’un hôpital, d’une école, ou d’un HLM ». « Qu’ils viennent m’arrêter ! », s’est-il écrié.

Donc le bilan de cette fête de l’humanité, la prestation de Fabien Roussel et des militants communistes a relevé du sans faute. Est-ce que pour autant tout est résolu : non tout reste à accomplir .

2014 : aujourd’hui cela est bien dépassé

CE PAS EN AVANT INDISPENSABLE APPELLE D’AUTRES AVANCEES

Il y a eu de grands absents dans cette fête : si l’on excepte un meeting autour de Cuba dans lequel André Chassaigne et l’ambassadeur de Cuba ont donné à la fête une dimension de lutte et de justice internationale, c’est peu dire que le contenu réel de l’indispensable mouvement de la paix, la nécessité d’affronter la politique de Macron que ce soit en Europe comme en Afrique a été éludée. Pourtant on ne peut pas limiter la question de l’inflation a une bataille pour l’énergie en ignorant totalement comment elle est déjà engagée au niveau géopolitique.

Macron c’est le choix d’une vassalisation au coût monstrueux.

S’il est nécessaire comme cela a été fait par Roussel de rompre avec la logique des banquets consensuels dans lesquels Macron, malgré la provocation des retraites et le choix de la guerre partout, tente d’apparaître comme le président du “dialogue”, en appelant le peuple français à exiger de l’Etat une autre politique, nous ne sommes qu’au milieu du gué. Il n’y a pas de consensus social, le président méprise la représentation nationale et l’opinion majoritaire des Français, le député communiste réclame l’intervention citoyenne et dans le fond en revient à la force de la Constitution de l’an II: la proclamation du droit à l’insurrection citoyenne, sans pour autant donner à cette intervention une autre visée que la démocratie directe. Oui mais le consensus autour de Macron ne se limite pas à entériner ses choix en matière d’énergie, le pire même si l’on en reste à cette conception républicaine est de priver les citoyens du droit à décider de la paix et de la guerre.

De ce point de vue, si ceux qui parmi les communistes encartés ou non, de la base au sommet ont dénoncé les opportunismes, les lâchetés de la représentation nationale ont sans doute aidé Fabien Roussel à éviter la question en restant sur la question sociale. Mais l’une mène à l’autre surtout dans le contexte des Européennes.

En outre si nous sommes convaincus que pour rompre avec l’inféodation aux marchés financiers, aux trusts de l’armement qui gouvernent en maître une UE de plus en plus vassalisée et d’identifiant avec l’OTAN, la rupture avec la NUPES est absolument indispensable parce qu’il est nécessaire de créer un autre rassemblement dans lequel peuvent apparaître les véritables adversaires, nous sommes encore loin de cette mise en évidence et plus nous nous en rapprocherons plus le combat va devenir rude, et moins on pourra compter sur les médias.

L’enjeu reste donc un parti apte à mener cette bataille qui ne peut pas être seulement électorale.

Ce qui s’est passé à la fête de l’humanité témoigne plus que jamais du sens de qui est à accomplir.

Danielle Bleitrach

 

L’électorat enseignant, convoité par les Le Pen par C. Lelièvre

Quelques piétons passent une affiche officielle de campagne de la candidate d'extrême-droite Marine Le Pen (Rassemblement National), sur un panneau d'affichage électoral (enseigne), le 5 avril 2022 à Paris.
Avril 2022, panneau d’affichage lors de la campagne présidentielle. Shutterstock

Le monde enseignant a longtemps été considéré comme foncièrement réfractaire au vote en faveur des partis d’extrême droite. Mais, désormais, on n’en est plus assuré, tant s’en faut.

C’est ce qu’avait d’ailleurs pointé à sa façon Marine Le Pen lorsqu’elle a salué la création du collectif Racine rassemblant des enseignants « bleu marine » en déclarant à la fin de son colloque du 12 octobre 2013 qu’une telle initiative « était inimaginable il y a quelques années ».

En réalité, la démarche délibérée des Le Pen vers les enseignants vient de loin, même si le succès n’a pas été au rendez-vous immédiatement.

Les messages des Le Pen adressés aux enseignants

Marine Le Pen s’était déjà adressée aux enseignants lors du colloque du Front national sur l’école de septembre 2011 en leur disant on ne peut plus nettement :

« Nous n’avons pas su vous parler. Longtemps nous avons commis l’erreur de croire que vous étiez complices de la destruction de l’école. Pour l’immense majorité d’entre vous, c’était une erreur et cette époque est révolue. »

Jean-Marie Le Pen lui-même était allé dans le même sens, cinq ans plus tôt, le 12 novembre 2006, lors de son discours au Bourget sur son « projet présidentiel » pour 2007, en se présentant comme « l’espoir de renouveau et la conscience progressiste du pays ». Il avait alors fustigé « le mépris des fonctionnaires, forcément absentéistes, qu’on veut rendre responsables de la destruction des services publics, alors que le plus souvent, fidèles à leur mission, ils en sont les premières victimes ».

Et pour ce qui concerne plus spécifiquement l’école et ses enseignants, Jean-Marie Le Pen avait mis en avant des préoccupations qui peuvent être partagées par nombre d’enseignants sans qu’elles soient des singularités propres au Front national :

« L’école est le véritable et premier lieu où se forge l’égalité, celle des chances. Or la véritable sélection, j’ose le dire, est source de l’égalité véritable […]. Lire, écrire, compter, connaître l’histoire et la géographie de son pays sont des bases essentielles qui aujourd’hui manquent à un élève sur quatre en sortie du primaire. L’école publique doit aussi respecter scrupuleusement la neutralité religieuse, politique et philosophique »

L’aggiornamento des Le Pen ne semble pourtant pas avoir eu un effet sensible immédiat. Quelques mois après son intervention au Bourget d’octobre 2006, Jean-Marie Le Pen n’obtient que 3 % des intentions de vote exprimées chez les enseignants pour le premier tour de la présidentielle de 2007 selon un sondage effectué en février 2007 par l’IFOP pour Le Monde de l’éducation.

Et quelques mois après son intervention de septembre 2011, Marine Le Pen n’atteint que 5 % des intentions de vote exprimées dans le sondage effectué par l’IFOP pour Le Monde de l’Éducation en février 2012. Marine Le Pen reste à l’étiage de ces 5 % selon le sondage effectué par l’IFOP à la mi-avril 2017.

Un vote enseignant en faveur du Rassemblement national minoritaire mais qui s’installe

Si on suit les indications du tableau 5 établi par Luc Rouban dans sa Note de recherche pour l’élection présidentielle 2022 à partir des données de l’enquête présidentielle 2022 par Cevipof et Ipsos, vague 24, d’avril 2021, on aurait eu 10 % de déclarations d’intentions de vote parmi les suffrages exprimés des enseignants, contre 8 % en mars 2017 est-il mentionné.

Luc Rouban. Les fonctionnaires face à l’élection présidentielle de 2022 (en avril 2021). [Rapport de recherche] CEVIPOF. 2021, pp.12. ffhal-03613479

Il semble bien qu’il y a eu un décollage progressif et continu (avec « effet retard ») du taux de déclarations d’intention de votes exprimées par les enseignants en faveur de Marine Le Pen passant de 5 % en février 2012 à 8 % en mars 2017 puis 10 % en avril 2021. Et cela va dans le sens d’un vote Le Pen qui s’installe dans le paysage enseignant durant ces dernières années, après bien des efforts de leur part.

À cela s’ajoute le taux d’intentions de vote exprimées en faveur de Marine Le Pen par les enseignants au second tour des élections présidentielles de 2022 qui attire l’attention et qui continue à être de nature à frapper les esprits.

Dès le 19 avril 2022, il a été indiqué dans le journal 20 minutes que « selon une enquête du Cevipof pour le second tour, 48 % des enseignants seraient prêts à voter pour Emmanuel Macron et 22 % pour Marine Le Pen ». Puis le 25 avril, sur RTL, il a été mis en avant qu’« un quart des professeurs a voté pour Marine Le Pen au second tour des présidentielles selon une étude du Cevipof ». Même s’il convient sans doute de relativiser (car au premier tour on choisit et au second tour on élimine, ce qui n’a pas le même sens), cela donne quand même à réfléchir.

S’il ne s’agit certes pas d’une vague susceptible d’emporter vraiment le monde enseignant, il n’en reste pas moins que l’on a quitté la place d’un vote dans les marges pour un vote certes foncièrement minoritaire chez les enseignants, mais qui s’installe et fait désormais partie du paysage.

 


Déclaration d’intérêts

Claude Lelièvre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche

2023, une année d’engagements pour des jours heureux!

2023, une année d’engagements par Maximilien Reynès-Dupleix

Laurent Lardeux : « La jeunesse est plurielle et diverse »

À rebours des analyses simplistes qui évoquent le « vote des jeunes » comme un ensemble homogène, la jeunesse apparaît comme un électorat aussi divisé que les autres tranches d’âge (quand elle vote) mais qui se distingue par ses priorités. Entretien avec le sociologue Laurent Lardeux, chercheur à l’INJEP.

Le vote des jeunes à l'élection présidentielle 2022 s'est réparti entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. Emmanuel Macron ne fait que 13 % chez les 18-24 ans et 16 % chez les 25-34 ans. © Philippe Huguen/AFP

Le vote des jeunes à l’élection présidentielle 2022 s’est réparti entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. Emmanuel Macron ne fait que 13 % chez les 18-24 ans et 16 % chez les 25-34 ans. © Philippe Huguen/AFP

Une jeunesse plurielle et aussi polarisée que ses aînés, mais qui ne vote pas pour les mêmes raisons que les plus âgés. Voilà ce qui ressort de l’enquête Youngelect 2022, cordonnée par les chercheurs Vincent Tiberj, Amaïa Courty, et l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP).

Un des slogans de la présidentielle 2022, côté majorité sortante, était « Macron, président des jeunes ». À la lumière de votre enquête, on en est bien loin…

Laurent Lardeux
Sociologue

Emmanuel Macron obtient ses meilleurs scores chez les plus de 65 ans. Il ne fait que 13 % chez les 18-24 ans et 16 % chez les 25-34 ans. On a parlé à raison de tripartition des votes, à la présidentielle, entre trois candidats – Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon – ayant capté à eux trois 75 % des voix. On ne peut pas vraiment parler de tripartition, en revanche, quand on prend le vote des moins de 35 ans, on observe plutôt une bipolarisation du vote autour de la candidature de Jean-Luc Mélenchon (38 % chez les 18-24 ans, 30 % chez les 25-34 ans) et de Marine Le Pen (28 % chez les 18-24 ans, 33 % chez les 25-34 %). Les jeunes qui ont voté pour le président de la République sont un électorat très marqué socialement, plutôt avantagés socialement ou scolairement. Continuer la lecture de Laurent Lardeux : « La jeunesse est plurielle et diverse »

Francia Márquez, candidate à la vice-présidence au nom des “ignorées” de Colombie

Nous vous avons présenté grâce à un article-poème de Cecilia Zamudio, l’amie colombienne, féministe et communiste l’espérance des Colombiens. Les résultats du premier tour confirment la vague qui monte dans ce continent et que portent les “rien”, les “ignorés”. Des résultats provisoires donnent largement en tête Gustavo PEREZ au nom de l’alliance de gauche avec sa vice-présidente dont nous vous présentons le portrait, elle s’appelle Francia. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

Selon des résultats officiels provisoires publiés dimanche soir, l’opposant de gauche Gustavo Petro a récolté plus de 40 % des voix lors du premier tour de la la présidentielle colombienne. Il affrontera au second tour l’indépendant et homme d’affaires Rodolfo Hernandez.

L’opposant de gauche Gustavo Petro est arrivé largement en tête du premier tour, dimanche 29 mai, de l’élection présidentielle en Colombie, et affrontera au second tour le 19 juin un candidat indépendant, Rodolfo Hernandez, selon les résultats officiels provisoires publiés en soirée.

Gustavo Petro cumule 40,33 % des voix, devant Rodolfo Hernandez (28,14 %), indiquent ces résultats donnés par le Registre national, en charge de l’organisation du scrutin, après le dépouillement de plus de 97 % des bulletins. Le candidat conservateur Federico Gutierrez, représentant la droite traditionnelle colombienne, est en troisième position avec 23,90 %.

À ses côté, candidate à la vice-présidence, l’Afro-Colombienne Francia Márquez dit représenter les “riens”, surtout des femmes. Témoignages de ces ignorées qui voteront pour elle. El País AméricaTraduit de l’espagnol

Le 15 mai 2022, Francia Márquez en campagne à Cali, dans le sud-ouest du pays.
Le 15 mai 2022, Francia Márquez en campagne à Cali, dans le sud-ouest du pays. PHOTO PAOLA MAFLA/AFP

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« Macron II » : le gouvernement Borne, un groupe de fidèles et de technocrates (Décryptages)

Le premier exécutif du second quinquennat d’Emmanuel Macron reconduit 13 ministres du précédent mandat, sur 23. Parmi les nouveaux, beaucoup de profils « technos », jamais élus, et deux surprises : l’historien marqué à gauche Pap Ndiaye à l’Éducation nationale, et l’ex-chef des députés LR Damien Abad aux Solidarités.

Le secrétaire général de l'Elysée, Alexis Kohler, annonce la composition du gouvernement sur le perron de l'Elysée.

Le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, annonce la composition du gouvernement sur le perron de l’Elysée. Ludovic Marin AFP

Véran, Dupond-Moretti, Dussopt, Le Maire… Pour « l’élargissement » et le « renouveau », on repassera. La composition du gouvernement Borne, premier du second quinquennat d’Emmanuel Macron, a été annoncée vendredi 20 mai, quatre jours après la nomination de la première ministre. Un délai qui s’explique par de nombreux refus et la nécessaire vérification des déclarations de chacun – et permet au passage de rogner un peu sur la campagne des législatives.

Le nouvel exécutif est composé de 17 ministres, 6 ministres délégués et 4 secrétaires d’État. Sur les 23 ministres, 13 étaient déjà dans le gouvernement Castex. Entre eux, c’est un petit jeu des chaises musicales : Bruno Le Maire est reconduit à l’Économie (à laquelle est ajouté le portefeuille de la « Souveraineté industrielle »), Eric Dupond-Moretti à la Justice, Gérald Darmanin à l’Intérieur. Mais Olivier Dussopt, représentant de « l’aile gauche » de la Macronie, lâche le Budget à Gabriel Attal et hérite du Travail : il devra notamment porter la controversée réforme du RSA… et le recul de l’âge de la retraite à 65 ans. Olivier Véran bascule de la Santé aux Relations avec le Parlement, laissant sa place à Brigitte Bourguignon, anciennement à l’Autonomie. Continuer la lecture de « Macron II » : le gouvernement Borne, un groupe de fidèles et de technocrates (Décryptages)

Le vote a-t-il mis en évidence une fracture générationnelle ? 2/2

Lors de l’élection présidentielle, les jeunes se sont davantage abstenus ou ont préféré Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. Les plus âgés se sont plutôt tournés vers Emmanuel Macron.

Une rupture générationnelle a bel et bien émergé au cours des dernières années au sein de l’électorat, mais elle s’articule avec une fracture sociale.

Mathieu Gallard Directeur d’études à l’Ipsos

La tripartition du paysage politique français qui a émergé en 2017 et s’est confirmée lors de la présidentielle de 2022 a conduit à une recomposition des électorats des principales familles politiques, en termes sociaux, géographiques ou générationnels. C’est probablement ce dernier aspect qui a le plus retenu l’attention des observateurs à la suite du premier tour, non sans raisons. Certes, les logiques traditionnelles de la participation électorale restent d’actualité : les jeunes, plus sceptiques vis-à-vis de nos institutions très verticales et considérant le vote comme un moyen d’action parmi bien d’autres, sont toujours nettement moins enclins à se rendre aux urnes : seuls 56 % des moins de 35 ans ont voté au premier tour de l’élection présidentielle, contre 81 % des 60 ans et plus. Continuer la lecture de Le vote a-t-il mis en évidence une fracture générationnelle ? 2/2