Surmenage, stress… « Nos modes de fatigue révèlent les manières d’exister socialement », explique l’historien Georges Vigarello

L'historien Georges Vigarello, en août 2020. © Hannah Assouline/Opale via Leemage

L’historien Georges Vigarello, en août 2020. © Hannah Assouline/Opale via Leemage

Alors que la pandémie accentue l’épuisement de nos sociétés, l’historien, spécialiste des mentalités et des sensibilités, propose une Histoire de la fatigue. Du Moyen Âge à nos jours. Il en montre les mutations comme autant de révélateurs des rapports des sociétés à la perception des corps et à leurs usages. L’infatigabilité devient-elle une nouvelle norme ? Quel lien entre fatigue et affirmation croissante de l’individu ? Entretien.

Historien du corps et de ses perceptions, vous affirmez que, avec la maladie, la vieillesse et la mort, la fatigue serait l’autre empêchement majeur des corps ?

Georges Vigarello Dans les années 2010, j’avais orienté mes recherches sur les évolutions des perceptions du corps, jusqu’à publier le Sentiment de soi. Je m’étais rendu compte que la perception des maladies avait évolué dans le temps, ainsi que celle de la fatigue et des perceptions intérieures. J’ai donc cherché à comprendre comment ce sentiment de fatigue avait évolué dans le temps. De manière anthropologique, il est vrai qu’il y a trois grands obstacles dans l’idée que nous nous faisons de l’existence. Ces trois grands obstacles sont la mort, la maladie et la fatigue. Or il se trouve que l’objet fatigue a été peu travaillé par les historiens, alors que de belles histoires de la perception de la mort et des maladies ont été produites, notamment à travers l’œuvre de l’historien Philippe Ariès. Pour faire cette histoire de la fatigue, j’ai tâché de croiser les textes médicaux, les témoignages des contemporains, les textes de mœurs et de morale, afin de repérer les manières de dire les fatigues. Ces manières de dire permettent, selon moi, de révéler dans chaque époque son rapport aux corps, de restituer en somme la culture d’une société. Nos modes de fatigue révèlent les manières d’exister socialement.

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Ce que l’on sait de CoVepiT, le « vaccin pour la vie » mis au point par un labo nantais

Laboratoire de biotechnologie de la société Ose Immunotherapeutics, à Nantes. © Julien Sureau / Actu.fr

Laboratoire de biotechnologie de la société Ose Immunotherapeutics, à Nantes. © Julien Sureau / Actu.fr

Le jeune laboratoire de recherche OSE Immunotherapeutics pense avoir trouvé un « vaccin pour la vie », efficace contre le Covid et ses variants. Il pourrait être produit début 2022. Si les acteurs publics ne manquent pas le coche de l’industrialisation…

Dans leur laboratoire situé sur les bords de la Loire, à quelques kilomètres des locaux de leur concurrent Valneva, les chercheurs d’OSE Immunotherapeutics développent aussi un vaccin contre le Covid-19.

À entendre la direction de cette jeune entreprise nantaise, le sérum, s’il franchit les prochaines étapes cliniques, pourrait aider à sortir de la crise sanitaire durablement, puisqu’il est conçu pour être efficace pendant plusieurs années.

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Pour des mesures d’urgence et une stratégie globale contre le Covid19 en milieu scolaire

Presque un an après le début de la crise sanitaire, la gestion ministérielle de ce dossier est marquée par de très nombreuses insuffisances qui frisent parfois l’irresponsabilité. Enfermé dans un déni coupable de réalité, le ministre de l’Éducation nationale multiplie les sorties médiatiques à contre-courant de la situation sanitaire réelle. Il prend aussi des décisions incompréhensibles dont la dernière en date est l’allègement du protocole sanitaire alors même que les variants circulent davantage sur le territoire.

Pourtant les différents avis et études scientifiques convergent tous pour mettre en avant le rôle actif de l’école dans la diffusion de l’épidémie.

Attachés au maintien de l’ouverture des écoles et des établissements comme à la scolarité en présentiel des élèves, la FSU, la FCPE, le collectif Ecole et Familles oubliées exigent la mise en place d’un protocole sanitaire qui permettrait enfin d’assurer la protection des élèves et des adultes et plus largement de la société par une gestion responsable et volontariste de la crise sanitaire. Continuer la lecture de Pour des mesures d’urgence et une stratégie globale contre le Covid19 en milieu scolaire

Séquence xénophobe : une inquiétante et significative dérive politique Par Patrick Le Hyaric

Alors que le panorama s’assombrit sur fond d’accélération des difficultés des travailleurs et des familles populaires, la question sociale est évacuée tandis que la France est entraînée dans une inquiétante dérive politique avec la normalisation des discours d’extrême droite.

Je souhaite pouvoir m’arrêter sur la séquence xénophobe de ces derniers jours tant elle mérite d’être méditée, étudiée. Elle doit surtout faire l’objet d’une réplique unitaire de tous les progressistes, de tous les démocrates.

Inquiétante et significative est la dérive politique dans laquelle la France est entraînée, sur fond d’accélération des difficultés des travailleurs et des familles populaires, et alors que le ciel s’assombrit sur le front social. Elle l’est pour tous les progressistes qui assistent effarés à une succession d’outrances sur l’islam et les musulmans. Elle est encore plus pour nos concitoyens de confession musulmane dont la religion fait l’objet de sordides manœuvres orchestrées par le pouvoir qui use de subterfuges pour détourner l’attention de la profondeur de la crise. L’extrême droite n’a plus à parler, à provoquer. Seul compte désormais pour elle de travailler sa respectabilité dans la perspective d’une prise de pouvoir.

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Dictionnaire Arbitraire (édition AuberBabel)

 NDLR de MAC: Un ouvrage rafraichissant des éditions AUBERBABEL à lire de toute urgence…

Le regretté1 Desproges avait eu l’idée à la fois géniale et farfelue d’écrire un « dictionnaire superflu » avec un seul mot par lettre dont un des charmes était que chaque article était agrémenté de la même illustration, avec une légende adaptée et toujours étonnamment pertinente, l’une d’entre elles étant le véritable titre du tableau utilisé.

Une de ces légendes était : « le pangolin s’est échappé ».

Je n’aurais pas le mauvais goût de faire remarquer, plus de trente ans après sa disparition, que non, malheureusement, le pangolin ne s’est pas échappé, du moins si on en croit les récits de source officielle. S’il s’était effectivement échappé, il n’aurait pas reçu la fiente de la chauve-souris enfermée à l’étage au dessus, ni fourni bien involontairement ses écailles souillées pour la confection d’une poudre de perlimpinpin, dont les vertus aphrodisiaques ne sont pas plus grandes que si on l’avait fabriquée avec des rognures d’ongle (fabrication bien inutile d’ailleurs puisqu’il suffit de se ronger les ongles pour absorber de la kératine), laissant ainsi les pangolins en paix et nous épargnant une pandémie.

Ce dictionnaire arbitraire ne prétend même pas à cette rigueur : les illustrations sont parcimonieuses et aléatoires, les articles sont disparates, la seule règle étant d’avoir au minimum un mot par lettre de l’alphabet. Travail beaucoup moins ambitieux, donc, qu’un dictionnaire tentant de recenser tout ce que l’honnête homme doit savoir, telle cette Encyclopédie des connaissances utiles parue en 1836, dont le tome seizième, d’un format à peu près analogue à celui-ci, nous mène seulement de Civilisation (suite – il faut dire que le programme est ambitieux) à Comestible, article qui renvoie lui-même aux articles aliment, farine, pain, pâte, salaison, etc., dont nous ne pourrons donc pas profiter si nous ne possédons que ce tome seizième.

Sans prétendre à l’exhaustivité ni même à la cohérence, notre système a cependant l’avantage de nous permettre de faire état de quelques questionnements, marottes, obsessions ou rancœurs, selon le système employé en 1940 par Godfrey Elton dans ses émissions radio, intitulées It occurs to me : c’est ce qui me passe par la tête et je vais donc vous en parler.

Mais sont-ce simplement des marottes ou des obsessions ?

Les définitions des mots choisis arbitrairement ne relèvent elles pas plutôt d’une « vision du monde », mélange d’objectivité et de subjectivité, même si elle reste parcellaire étant donné le procédé choisi ?

1 C’est vraiment une façon de parler, parce que je ne l’ai découvert qu’après sa mort. C’est pourquoi il ne m’a jamais déçu. Qui sait, il serait peut-être devenu gâteux, ou pire, réac et sentencieux.


Quatrième de couverture

Sans prétendre à l’exhaustivité, ce petit livre, n’a de dictionnaire que l’ordre alphabétique de ses articles, choisis par ses différents contributeurs en fonction des idées qui leur sont passées par la tête à un moment quelconque, ce qui n’enlève à priori rien à leur pertinence éventuelle. Les rubriques ayant été collectées juste avant la crise du « gros vide », il est temps de s’attaquer dès aujourd’hui au tome deux afin d’y disséquer les nouveaux barbarismes apparus depuis. Ces nouveaux maux sont à définir d’urgence si nous ne voulons pas devenir leurs esclaves. A vos plumes !


En vente pour 10 € ou 12€ avec envoi. S’adresser à Alexandra Tricottet <alexandra.tr@laposte.net>

France-Algérie : quel travail de reconnaissance après le rapport Stora ? (2)

Rapport B. Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie/@AFP

Rapport B. Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie/@AFP
 

Le rapport de Benjamin Stora suscite de nombreuses réactions. Comment s’en saisir pour avancer sur la voie de la vérité et de la réparation ?

Aux sociétés civiles des deux pays à s’emparer de l’ouverture qu’offre Stora

Yacine Teguia Producteur de cinéma et membre du bureau national du Mouvement démocratique et social (Algérie)

« Pour exorciser l’horreur qui a un nom et un visage, il faut lui donner un autre nom et un autre visage » Chris Marker, Sans soleil

Le rapport Stora sur les mémoires de la colonisation et la guerre d’Algérie suscite la controverse. En France, on soupçonne le président de gérer des questions de société ou de verser dans les calculs électoraux, en agitant la « nostalgérie ». En Algérie, le pouvoir invite à se désintéresser d’un débat franco-français tout en alimentant la polémique en sous-main. Dans les rangs du hirak, la contestation surgie en février 2019, les uns flairent une diversion vis-à-vis de la crise sanitaire, socio-économique et politique, tandis que d’autres exigent la réécriture du récit national autour de la guerre de libération, mais aussi des luttes démocratiques et pour la reconnaissance de l’amazighité. D’ailleurs, le 16 février, des milliers de citoyens réunis à Kherrata ont commémoré les premières manifestations du deuxième anniversaire du hirak ainsi que la lutte pour l’indépendance, sur un site des massacres du 8 mai 1945.

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À Montauban, le Planning familial fait face à la crise

Chantal Teyssedre est animatrice de prévention. Elle conduit le bus du Planning familial dans tout le département.DDM.B.G.
Chantal Teyssedre est animatrice de prévention. Elle conduit le bus du Planning familial dans tout le département.DDM.B.G.

Entre port du masque, gestes barrières et fermeture de son accueil de jour pour les femmes victimes de violences, le Planning familial a dû s’adapter à la crise pour poursuivre ses missions.

« Le Covid a modifié une grande partie de notre travail », déclare Monique Monribot, coordinatrice du Planning familial du Tarn-et-Garonne. Au cours de ces derniers mois de crise sanitaire, les cinq salariées de l’association ont dû s’adapter, trouver de nouvelles façons de communiquer avec leurs bénéficiaires, revoir le contenu de leurs interventions, aller à la rencontre de nouveaux publics jusqu’alors sans problème…

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École inclusive : « Il y a des situations terribles de souffrance »

Anne Falciola estime "que l'accompagnement au plus tôt, dès le premier degré, conditionne la suite et la possibilité de poursuivre sa scolarité". © R. Quadrini

Anne Falciola estime « que l’accompagnement au plus tôt, dès le premier degré, conditionne la suite et la possibilité de poursuivre sa scolarité ». © R. Quadrini

Anne Falciola accompagne des élèves en situation de handicap depuis plus de douze ans. Dans la rue avec ses collègues le 11 février, cette AESH raconte le quotidien de sa profession.

« On a ce cliché qui dit que nous sommes forcément des chômeurs de longue durée en réinsertion… Je l’ai en horreur, parce qu’il nous enferme dans une vision négative, péjorative. C’est la treizième année que je fais ce métier : je sais par expérience qu’on ne reste pas longtemps si on n’a pas vraiment envie. Nous sommes nombreux à exercer ce métier par choix, alors qu’on sait que les conditions ne sont pas géniales, pour permettre à tous les enfants d’avoir accès à l’école et les aider à avancer. » Anne Falciola est AESH (accompagnante d’élèves en situation de handicap) à Lagneux, dans l’Ain. Elle est aussi membre du collectif national AESH de la CGT Éduc’action : à ce titre elle a, bien sûr, pris part à la journée nationale de mobilisation de ces précaires de l’éducation nationale, le 11 février, à l’occasion du 16e anniversaire de la loi de 2005 sur le handicap. Alors elle ne tient pas trop à se mettre en avant et pense surtout à expliquer leurs revendications.

Mais elle a plus, bien plus à dire.

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Pierre Dharréville : « La santé au travail, ce devrait être du concret »

Pour le député communiste Pierre Dharréville, cette proposition de loi« aurait pu voir plus grand ».

Votée mercredi soir à l’Assemblée nationale par la majorité, la proposition de loi ambitionnant de renforcer la prévention en milieu professionel ne fait qu’effleurer les problèmes, selon le député PCF des Bouches-du-Rhône.

La proposition de loi portée par deux députés de LaREM pour « renforcer la prévention en santé au travail » a été votée par l’Assemblée mercredi soir. Censé insuffler une nouvelle dynamique de prévention, ce texte a été rejeté par le groupe communiste, les insoumis et les socialistes. Le député PCF Pierre Dharréville, par ailleurs auteur d’un rapport parlementaire sur les maladies et pathologies professionnelles dans l’industrie, critique sa faible portée.

Les salariés gagnent-ils de nouveaux droits avec ce texte ?

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« Dépêche du Midi »: Arrangements… Par Alain Raynal in Les nouvelles 82 N°605

La liberté de la presse est un bien trop précieux pour ne pas veiller sur elle et garantir ainsi à chaque journaliste le droit d’écrire ce qu’il estime nécessaire. Ce droit fondamental va de pair avec celui du lecteur de s’interroger, de critiquer et d’alerter s’il le juge utile.

La lecture du billet « Les juges contre le peuple » rédigé par Laurent Benayoun, rédacteur en chef de l’édition Tarn-et-Garonnaise de « La Dépêche-du-midi » laisse un goût amer et c’est peu dire. Brigitte Barèges serait victime « d’une exécution provisoire qui a le goût du sang, d’une guillotine qui ne dit pas son nom ». Après six années d’enquêtes approfondies, Brigitte Barèges est condamnée, entre autres, à abandonner ses mandats. Elle peut faire appel. La justice suivra son cours.

Ne tournons pas autour du pot.

Bien au-delà des mots écrits dans le quotidien régional politiquement lié à la famille radicale du PRG, – et en soi ce n’est pas un problème – le malaise résulte de ce qui se raconte ouvertement à Montauban et ailleurs depuis de nombreux mois. A savoir : ces « petits arrangements » entre la droite LR et le PRG dans le Tarn-et-Garonne pour se répartir les manettes du pouvoir local. A moi le Département, à toi la Ville, à l’autre l’Agglomération…

Il est devenu malsain et dangereux de taire le malaise grandissant créé parmi les gens sincèrement de gauche dans la ville et le département.

A tous ces tripatouillages qui ne peuvent qu’accentuer le rejet de la politique parmi les électeurs viennent se greffer les rapports nauséabonds qu’entretient Brigitte Barèges avec le lepéniste Ménard.

« Y’a pas d’arrangement, pas de grimace.

« Juste le lendemain se regarder dans une glace… » Chantait le groupe Zebda.

Il n’y a pas d’arrangements sauf à y laisser son âme, ou son honneur, selon…

Alain Raynal