Entretien de l’Agora: Ovidie, l’intime politique en question

La réalisatrice Ovidie s’est confiée à l’Humanité après sa participation au débat « Féminisme. Quand l’intime est politique » à l’Agora de la Fête de l’Humanité. « Un débat passionnant et riche en réactions car les thématiques liées à la sexualité et l’intime sont rarement abordés dans les milieux militants. » précise la documentariste.

Entretien réalisé par Latifa Madani, journaliste de l’Humanité.

Comment enseigner la laïcité aujourd’hui ? #2

© AFP

Rappel des faits   La laïcité permet à toutes et tous de vivre libres et égaux. Mais, dans un contexte de repli identitaire, quel enseignement proposer ?

La formation du jugement par la raison et la culture commune

Paul Devin, président de l’Institut de recherche de la FSU

Jean-Michel Blanquer voudrait nous faire croire à une incurie de l’éducation à la laïcité et à sa détermination personnelle à transformer cette situation. Pour imposer l’urgence de cette volonté, voilà revenu le temps des descriptions dramatisantes d’une école en proie au fanatisme islamiste, dont Jean-Pierre Obin, chargé du dossier de la formation à la laïcité par le ministre, expliquait les raisons devant le Sénat, le 10 mars dernier : naïveté, lâcheté et complaisance idéologique. Les acteurs du service public d’éducation n’ont guère apprécié que leur engagement soit l’objet d’accusations si violentes car la réalité est tout autre.

Les enseignantes et les enseignants, et avec eux l’ensemble des personnels, ne cessent d’œuvrer, au quotidien de leurs pratiques, pour lutter contre l’obscurantisme, les préjugés, les stéréotypes et pour convaincre des valeurs républicaines. Mais ils ne choisissent pas de le faire en assenant à leurs élèves une vérité dogmatique, en prescrivant leurs comportements ou en les sanctionnant par des mesures disciplinaires : ils optent pour une éducation patiente qui postule que les savoirs et la culture commune permettront à leurs élèves de fonder leurs jugements et leurs choix citoyens sur la raison et dans le respect des valeurs de la démocratie. Convaincus des vertus émancipatrices de l’école, ils en acceptent les lenteurs, les difficultés, parfois les échecs. Ils savent que la responsabilité du citoyen ne peut faire l’économie de la complexité d’une construction intellectuelle et culturelle.

Icon QuoteLes injonctions ministérielles poussent à ce que la lutte contre les manquements à la laïcité prenne une place majeure aux dépens du débat et de l’argumentation.

Sans doute ont-ils besoin d’être davantage formés à l’ensemble des dimensions de la question laïque, qu’elles soient historiques, philosophiques, sociologiques ou juridiques. Mais le paradoxe est que, disant vouloir mieux former les enseignantes et les enseignants, le ministère met fin aux activités de l’institution la plus active dans ce domaine : l’Observatoire de la laïcité. C’est qu’il ne s’agit sans doute pas tant de mieux former que de s’assurer de contenus conformes à l’idéologie ministérielle et gouvernementale. Car, obsédées par les prétendus risques du séparatisme, les injonctions ministérielles poussent à ce que la lutte contre les manquements à la laïcité prenne une place majeure aux dépens du débat et de l’argumentation.

En agissant ainsi, elles incitent à ce que l’affirmation de l’unité de la République submerge la réalité de la diversité des cultures en prenant le risque de la stigmatisation et du rejet. Faisant un tel choix, le ministère n’hésite plus à concevoir une campagne de publicité qui assigne une religion à des origines signifiées par un prénom ! L’enseignement de la laïcité doit tout d’abord affirmer le principe premier de la loi de 1905 : la République assure la liberté de conscience. Depuis la Déclaration de 1789, nous affirmons que les citoyennes et les citoyens ne peuvent être inquiétés pour leurs opinions, y compris religieuses. Mais affirmer ce droit, c’est admettre qu’il puisse nécessiter des contraintes, celle par exemple de la neutralité du service public, neutralité nécessaire pour garantir l’égalité de toutes et de tous.

Pour que les élèves puissent comprendre cela, nous devons faire le choix de l’argumentation et du débat, plutôt que celui de la lutte contre les manquements. Former à la laïcité, c’est considérer que l’exigence de soumission aux règles ne peut pas prendre le pas sur la compréhension des finalités de concorde et de tolérance du principe laïc. Former à la laïcité, c’est former aux exigences d’une dialectique qui admet la diversité des cultures tout en favorisant l’adhésion partagée aux valeurs de la République.

C’est pourquoi, plutôt que de hurler avec les loups, nous devons faire le choix du primat de l’éducation, celui de la formation du jugement par la raison et la culture commune, condition d’un exercice libre et responsable de la citoyenneté.

Les programmes doivent être élaborés démocratiquement

Texte collectif

Depuis les attentats islamistes de 2015, et plus encore après l’assassinat de Samuel Paty par un terroriste islamiste, il y a un an, l’enseignement de la laïcité apparaît à la fois comme une urgence et comme un défi. L’injonction à « enseigner la laïcité » est contredite par les politiques éducatives menées par Blanquer et Macron, qui font la part belle à l’enseignement privé, qui cherchent brutalement à transformer les enseignants en exécutants et font ainsi obstacle à la construction de l’esprit critique, et qui renoncent à l’ambition d’une école commune à toutes les classes sociales. La laïcité n’est pas un objet d’enseignement parmi d’autres. Pour enseigner la laïcité, il faut la mettre en pratique, et cela engage un projet pour l’éducation : celui d’une école commune qui permette à tous les élèves de s’approprier des savoirs pour comprendre le monde dans lequel ils vivent et le transformer.

Icon QuoteUn projet pour l’éducation : celui d’une école commune qui permette à tous les élèves de s’approprier des savoirs pour comprendre le monde dans lequel ils vivent et le transformer.

L’enseignement de la laïcité n’a donc rien à voir avec l’imposition de valeurs ou de principes, fussent-ils républicains. Il s’agit au contraire d’enseigner le processus historique dans lequel la laïcité s’est construite, de donner à comprendre les débats qu’elle a suscités, sa portée et ses enjeux, pour construire ensemble des valeurs et des principes partagés. Les perspectives disciplinaires, en histoire mais aussi en sciences économiques et sociales, en français, en philosophie ou en éducation physique et sportive, par exemple, sont à ce titre bien plus éclairantes qu’un enseignement dédié qui risquerait de tourner au catéchisme républicain. Encore faudrait-il avoir le temps de les développer : les politiques de réduction du temps scolaire menées depuis plus de dix ans, avec le passage à la semaine de 26 heures au collège ou la réduction des horaires de français et d’histoire à 1 h 30 hebdomadaire en lycée professionnel, rendent un tel enseignement de plus en plus difficile.

Tous les élèves sont capables de réflexion et d’échanges argumentés, mais ils ne le sont pas à n’importe quelles conditions. Pour que tous les élèves puissent s’approprier la culture scolaire, la faire dialoguer avec leur culture familiale et avec celle des autres, accéder à la réflexion critique et se construire comme personnes libres dans le collectif, la question du temps est essentielle : c’est pourquoi le PCF propose de revenir à une semaine de 27 heures de classe en primaire et d’arriver progressivement à 32 heures hebdomadaires dans le secondaire. Donner du temps est nécessaire, mais ne suffit pas.

Icon QuoteL’enseignement ne peut pas être émancipateur si les enseignantes et les enseignants ne sont pas en position de maîtriser leur métier.

L’enseignement ne peut pas être émancipateur si les enseignantes et les enseignants ne sont pas en position de maîtriser leur métier : les contenus qu’ils enseignent, les origines des difficultés des élèves, leurs propres pratiques d’enseignement. Cela implique de reconstruire une formation initiale et continue de haut niveau, mais aussi de rompre avec les politiques qui transforment les chefs d’établissement et les cadres de l’éducation nationale en managers. Pour enseigner les sujets qui font débat dans la société, les enseignantes et les enseignants ont besoin de pouvoir s’appuyer sur un collectif à la fois cohérent et démocratique.

Surtout, l’émancipation de nos élèves suppose un enseignement laïque, protégé de tous les dogmes, qu’ils soient religieux, politiques ou économiques. Il est dangereux qu’une conception de la laïcité très contestée par les spécialistes de la question soit imposée dans l’institution scolaire parce qu’un ministre en a décidé ainsi. Il est tout aussi dangereux que des lobbies patronaux, relayés par certains économistes, influencent les programmes de sciences économiques et sociales en faisant des postulats et des résultats de l’économie néoclassique une vérité révélée.

Pour éviter l’instrumentalisation des programmes au gré des alternances politiques, ils doivent être élaborés démocratiquement par les enseignantes et enseignants, les chercheuses et les chercheurs, en y associant l’ensemble des acteurs de l’éducation, de la vie culturelle, économique et sociale.

Signataires : Sébastien Laborde, Christiane Le Pennec, Erwan Lehoux, Marine Roussillon, Patrick Singéry, membres du réseau école PCF.

La distinction du privé et du public est capitale

Henri Pena-Ruiz, philosophe

D’abord une explication du mot. La laïcité, c’est l’indépendance des lois communes par rapport à toute religion, garantie par la séparation. «L’État chez lui, l’Église chez elle » : la formule célèbre de Victor Hugo, poète croyant, dit l’essentiel, comme l’a rappelé l’historien Jean-Paul Scot. Un peu d’étymologie. Le mot laïcité vient du grec laos, qui désigne l’ensemble du peuple, sans distinction ni domination.

La Révolution française, en abolissant les privilèges et en faisant de la souveraineté populaire le fondement de la souveraineté nationale, a promu l’émancipation individuelle et collective sur le plan juridique. Les lois communes sont désormais fondées sur les droits de l’être humain, et c’est tout le peuple qui se les donne à lui-même.

Icon QuoteLa laïcité impulse l’émancipation de la vie spirituelle, la façon de s’accomplir, et finalement la construction de soi, désormais délivrées de toute mise en tutelle.

Dans la foulée d’une telle refondation de la nation, la laïcité se définit par le triptyque qui réunit la liberté de conscience, l’égalité de droits, et l’intérêt général comme raison d’être de l’action publique. La séparation laïque n’est donc hostile ni aux religions ni à l’humanisme athée ou agnostique, qui sont des options spirituelles libres mais particulières en ce sens qu’elles n’engagent qu’une partie des citoyens et citoyennes. La laïcité impulse l’émancipation de la vie spirituelle, la façon de s’accomplir, et finalement la construction de soi, désormais délivrées de toute mise en tutelle. Elle est donc bonne pour toutes les personnes. Cet universalisme du souci de liberté en fait un authentique levier d’émancipation et de promotion du bien commun à tous.

La mise en œuvre de l’idéal laïque est exigeante, car elle se heurte à des résistances. Aux clergés crispés sur leurs privilèges, et aux traditionalistes attachés à leurs dominations, elle oppose sa logique émancipatrice. Quant aux responsables de l’action publique, elle leur impose une véritable déontologie, c’est-à-dire des règles qui assurent le respect de tous les citoyens et montrent l’exemple. La neutralité laïque interdit à un élu de privilégier une conviction spirituelle dans l’exercice de ses fonctions, par exemple en consacrant des deniers publics à la religion, ou à l’athéisme.

L’argent public, venu de tous, doit profiter à tous. Pas de clientélisme électoral, qui lèse le bien public. La chose est limpide et simple. Cette déontologie en actes fait de tout élu un instituteur de la laïcité. C’est dire qu’il doit réserver à sa sphère privée la manifestation de sa propre conviction spirituelle. Il en va de même pour les enseignants de l’école publique, qui assurent la promotion de l’autonomie de jugement de leurs élèves en évitant tout prosélytisme.

Icon QuoteUne boussole essentielle pour les citoyens comme pour les élus et les enseignants.

Le sens de l’intérêt général interdit tout privilège public de la religion comme de l’humanisme athée. En France, selon un sondage Ipsos récent, les athées, qui ne croient pas en Dieu, et les agnostiques, qui ne s’en soucient pas, sont aujourd’hui majoritaires. Mais pas plus qu’aux fidèles des religions, cela ne doit leur donner de privilèges. « L’égale liberté et l’égal traitement des options spirituelles » déploient le principe républicain d’égalité. Voilà une boussole essentielle pour les citoyens comme pour les élus et les enseignants. La distinction de ce qui est privé et de ce qui est public est ici capitale.

Pour expliquer pleinement la laïcité, il faut en montrer l’enjeu pour la paix et l’émancipation. Il ne s’agit pas de nier les différences, mais de faire en sorte que leur expression ne compromette pas le cadre commun qui assure leur coexistence. Une exigence qui vaut au regard de toutes les religions. Rien de compliqué à cela, et nul besoin d’adjectif pour le mot laïcité. La vouloir « ouverte », c’est insinuer qu’en elle-même elle serait fermée. Une calomnie commune aux adversaires de la laïcité, nostalgiques des privilèges perdus de la religion et bien souvent des traditions rétrogrades sacralisées par elle.

Le machisme patriarcal, la domination des femmes, la persécution des homosexuels et des athées, la réduction du sexe à la procréation, l’intolérance et le fanatisme mortifères, entre autres, sont dans toutes les mémoires. Des choses à rappeler, afin de montrer à quoi la laïcité et l’idéal humain qui la fondent nous permettent d’échapper.

Icon Education Henri Pena-Ruiz est notamment l’auteur du Dictionnaire amoureux de la laïcité (Plon, 2014)

Lire aussi Comment enseigner la laïcité aujourd’hui ? #1

Présidentielle 2022. Contre l’extrême droite, Fabien Roussel brandit la loi Gayssot

Le candidat PCF propose de rendre inéligibles les personnes condamnées pour racisme ou incitation à la haine.

Faut-il empêcher les condamnés pour racisme de candidater à l’Élysée ? C’est en tout cas la proposition de Fabien Roussel. Invité sur Radio J, dimanche, le candidat PCF à l’élection présidentielle a déclaré vouloir «renforcer la loi Gayssot en rendant inéligibles des personnes qui sont condamnées pour racisme, pour incitation à la haine raciale, pour discrimination en fonction de sa religion».

La loi Gayssot, adoptée en 1990, réprime tout acte raciste, antisémite ou xénophobe. L’article premier stipule que « toute discrimination fondée sur l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion est interdite ». Pour le député du Nord, si «aujourd’hui, des juges d écident de rendre inéligibles des responsables politiques, des élus qui ont, par exemple, fait du détournement de fonds», il pourrait en être de même d’une condamnation pour discrimination raciale ou religieuse, puisque ces faits « portent atteinte aux valeurs de la République, à la cohésion nationale ».

Une référence à Zemmour, probable candidat

En effet, une peine complémentaire d’inéligibilité s’avère automatique pour tous les crimes et pour certains délits, qui n’incluent pas les délits d’incitation à la haine raciale, ni de discrimination raciale. Seul le juge peut aujourd’hui décider, de manière discrétionnaire, si une personne déclarée coupable de ces faits peut être interdite de se présenter à une élection.

Le communiste faisait référence à Éric Zemmour, probable futur candidat à la présidentielle. En effet, le polémiste d’extrême droite a été plusieurs fois condamné par la justice. Une première fois en 2011, pour provocation à la discrimination raciale lorsqu’il avait dit, en 2010, sur le plateau de Salut les Terriens (Canal Plus), à propos du contrôle au faciès : «Mais pourquoi on est contrôlé 17 fois ? Pourquoi ? Parce que la plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c’est comme ça, c’est un fait. »

Puis, en 2019, la Cour de cassation a confirmé la condamnation du polémiste pour provocation à la haine religieuse envers les musulmans, après qu’il eut évoqué une « invasion » de la France sur l’émission C à vous (France 5), en 2016.

Le 11 octobre, Éric Zemmour a réagi aux propos de Fabien Roussel au micro de Sud Radio : «C’est la vieille technique des communistes, c’est-à-dire on invente des délits d’opinion et puis, après, on fait condamner pour ces délits d’opinion qu’on a inventés.» Une référence à la loi Gayssot, qui porte le nom du député communiste qui l’a initiée, et qui serait une insupportable machine à censurer pour Éric Zemmour. On lui rappellera que le racisme ne saurait être une opinion, mais qu’il fait bel et bien de lui un délinquant au regard de la justice.

Christophe Alévêque :  » Le vieux con d’aujourd’hui est un résistant « 

Christophe Alévêque.
Christophe Alévêque. SK – Stephane KERRAD / KB STUDIOS PARIS

Face à l’expansion du nouvel ordre moral, à la  « cancel culture », au « manichéisme ambiant » et à « la lente extinction du plaisir » auxquels nous conduit selon lui notre société contemporaine, l’humoriste a décidé d’assumer son statut de « vieux con moderne ». Entretien.

Comment êtes-vous devenu un vieux con ?
On le devient par la force des choses ! Ces dernières années, je me sentais de moins en moins en phase avec mon époque, voire totalement décalé. Je me suis demandé d’où ça pouvait bien venir, et puis, petit à petit, dans les discussions, en écoutant les médias, je me suis rendu compte que je n’étais plus dans le couloir de la pensée officielle, de cet empire du bien qu’on veut nous imposer. J’étais devenu un ringard ! Je me suis dit « suis-je vraiment le seul ? », et j’ai très rapidement réalisé que non, qu’au contraire nous étions nombreux à ressentir ce décalage. Raison pour laquelle je crée officiellement le Club des vieux cons modernes.

À quoi ressemble ce « vieux con moderne » ?
C’est un résistant. Un libre penseur. Quelqu’un qui veut disposer librement de sa vie et de sa mort, qui n’a pas envie qu’on encadre son bonheur en permanence et qui trouve insupportable la dictature du bien qu’on veut nous imposer. Ce bien au nom duquel on restreint nos libertés, sous la pression duquel notre cadre idéologique se réduit, et qui finit par produire l’effet inverse : plus on met avant la laïcité, plus l’obscurantisme se développe, plus on diabolise la violence, plus elle augmente, plus on prône la société multiraciale plus elle devient multiraciste, plus on fait la promotion du vivre ensemble et plus on voit le communautarisme et le repli sur soi avancer.

Comment en êtes-vous arrivé à revendiquer cet étrange statut ?
Parce que le vieux con de maintenant est un conservateur de la Révolution. Quelqu’un qui n’a pas envie de voir toutes les idées de liberté, de tolérance, de partage et de solidarité qu’il a défendues toute sa vie tomber dans les mains des nouveaux curés de la pensée. Or, aujourd’hui, la société étant devenue manichéenne, il est très difficile d’avoir une position qui va à contre-courant de la pensée dominante. Nous-mêmes, humoristes, on est de moins en moins invités dans les médias, on a même parfois tendance à brider notre expression face à une opinion qui a pris une place insensée et nous châtie au moindre écart.

Mais on entend pourtant des choses ahurissantes sur certains plateaux de télé…Oui, c’est encore un effet inverse : on assiste à une sorte de retour du puritanisme d’un côté et à un déferlement de violence verbale et idéologique de l’autre. Et entre les deux, il reste peu de place… À part pour des polémiques de supérette. J’ai quand même entendu l’autre jour sur une chaîne d’info qu’on débattait pour savoir si la crise sanitaire avait signé la fin du soutien-gorge… Le débat, c’est pas ça ! Le débat, c’est confronter des idées, des réflexions, des opinions et être capable de dire « je me suis trompé », « vous avez raison », « essayons » ou « pourquoi pas ? »
L’article 8 de votre Charte du vieux con moderne dispose que « l’être humain est pétri de faiblesses et d’erreurs et que vouloir le rendre parfait est une absurdité »…
Évidemment que c’est absurde ! On nous promet un monde magnifique, respectueux, mais on oublie que l’Homme ne peut pas devenir tolérant, ouvert et généreux si on lui en donne l’ordre ! Ça ne marche pas comme ça. Pour être tolérant, généreux et ouvert, il faut le devenir. Comprendre ce que cela veut dire, en accepter les implications. Les injonctions, au contraire, non seulement ne marchent pas mais ne font que créer de la frustration.

Vous regrettez que nous nous soyons donnés au « grand Gafam (*)» et dites votre détestation des réseaux sociaux. N’est-ce pas un combat perdu d’avance ?
Nous sommes coincés entre « Big Mother », cet Etat qui nous infantilise, nous culpabilise en permanence « pour notre bien », et « le grand Gafam ». Nous sommes pris en étau entre le premier, qui nous dit désormais ce qu’il faut penser, et le second, qui sait en permanence via nos téléphones ce que nous faisons, ce que nous disons, ce que nous mangeons, où nous allons… La réalité, c’est qu’on est épiés du matin au soir, désossés dans notre intimité, le tout avec notre permission. Mais si on le dénonce on est un réac’! Notre monde est devenu totalement manichéen, sans aucune place pour une pensée à contre-courant.

Comment observez-vous la mécanique qui se met en place à l’approche de l’élection présidentielle ?
Avec Zemmour, que je considère comme un épiphénomène, on est en train de créer un monstre, ce que j’appelle un épouvantail à cons. Zemmour est en train de remplacer la famille Le Pen dans le rôle de celui qu’il faut détester. On le fabrique, collectivement, et on dit « Regardez comme c’est pas bien ce que dit ce type ! ». En lui-même, il n’est pourtant pas très intéressant. En revanche, il nous dit quelque chose de notre société. Parce que quand on entend que « le fait qu’il puisse s’exprimer prouve qu’on est en démocratie », moi je pense plutôt que l’expression d’un type comme ça montre que notre démocratie ne va pas bien du tout.

Expositions, livres, films, œuvres censurées ou précédées d’un avertissement, « l’épuration culturelle avance irrésistiblement », regrettez-vous. De quelle manière ?
On veut noircir le passé, le charger d’un maximum de culpabilité pour que le présent apparaisse comme un cadeau. On déboulonne les statues, on assainit les œuvres, on boycotte des artistes au nom du bien. Et comme le terme de révisionnisme était déjà pris, on a appelé ça la « cancel culture »… Or, de mon point de vue, ce n’est pas parce qu’on enlève la photo de l’Uncle Ben’s des paquets de riz que le racisme va disparaître. Mais là encore, comment s’élever contre une telle mesure, aussi inutile soit-elle, dans le contexte actuel ? Puisque tout ça, c’est pour notre bien !
« Nous vivons dans une fausse démocratie. Nous sommes des Chinois à l’usine qui nous prenons pour les héritiers des Lumières », écrivez-vous. C’est un réel cauchemar que vous décrivez là…
Je pense qu’il y a très longtemps que la démocratie n’a pas été aussi malade. Nous tombons dans le despotisme démocratique que décrivait Tocqueville, en abandonnant nos libertés doucement mais sûrement. Résultat : les complotistes et conspirationnistes de tout poil, ragaillardis, se portent à merveille. Et ce sont désormais les extrêmes qui s’emparent de la défense des libertés. Vous vous rendez compte ? Mais alors, il nous reste quoi, à nous ? Franchement, je crois qu’aujourd’hui, dans notre situation, on a plus besoin de psychiatres et de philosophes que d’économistes et de politiques. Nous devons ralentir, nous poser et penser à nouveau.

Propos recueillis par Samuel Ribot / ALP
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À lire : « Eloge du vieux con moderne », Éditions du Cerf, 186 pages, 18 €.

 

Emploi et salaires. Les communistes s’attaquent aux vrais problèmes + Bon de soutien

L’emploi et les salaires constituent la préoccupation numéro 1, le PCF entend donc les replacer au cœur du débat pour 2022. Dès le 9 octobre, place à une semaine de mobilisation sur le travail et le pouvoir d’achat. Puis, en novembre, son candidat, Fabien Roussel, partira à la rencontre des Français.

Imposer la question sociale dans la campagne pour 2022.

Le pari est difficile tant les écrans et les ondes sont saturés par l’extrême droite. Mais le PCF ne désarme pas. « Nous voulons mettre la question sociale et écologique au cœur de la présidentielle, pointer la responsabilité du capitalisme, avec l’ambition de prendre le pouvoir sur l’argent », assure son candidat, Fabien Roussel. « Le décalage est immense entre les préoccupations des Français et les obsessions identitaires imposées dans le débat public. La santé, l’éducation, le pouvoir d’achat caracolent en tête », relève son directeur de campagne, Ian Brossat. Elles feront d’ailleurs l’objet de grandes réunions publiques thématiques avec le candidat communiste. Continuer la lecture de Emploi et salaires. Les communistes s’attaquent aux vrais problèmes + Bon de soutien

Grand remplacement, identité, sécurité, islam… : les thèmes de l’extrême droite sont partout

© Stéphane Audras/REA

Le phénomène n’est pas nouveau, mais il prend une ampleur décisive en ce début de campagne présidentielle : dans les discours et les propositions, les thèmes de l’extrême droite se répandent comme une traînée de poudre. Une course à l’échalote dangereuse qui prend sa source dans de multiples causes, à commencer par le confusionnisme et le vide laissé à gauche.

La fuite en avant semble sans fin. Pas un jour ou presque sans une parole haineuse, un article accusateur, un sondage fielleux. Pas un jour sans un irresponsable politique cherchant à surfer sur la dernière polémique, pour dénoncer les « immigrés trop nombreux », « l’islamogauchisme », « la guerre civile qui vient ». Les thèmes de l’extrême droite sont partout : identité, grand remplacement, sécurité, islam, immigration, jusque dans les bouches des ministres macronistes. Continuer la lecture de Grand remplacement, identité, sécurité, islam… : les thèmes de l’extrême droite sont partout

Moissac. « Sodexo la gloutonne » : Jean Songe met les pieds dans le plat in DDM

Jean Songe et son nouvel ouvrage Sodexo la gloutonne, paru aux éditions du Seuil. Photo DDM C.L.
Jean Songe et son nouvel ouvrage Sodexo la gloutonne, paru aux éditions du Seuil. Photo DDM C.L.

Une multinationale française que l’auteur moissagais n’hésite pas à passer au scalpel pour en dévoiler les ficelles.

Il y a bien des années qu’il a déposé ses valises avec sa famille au cœur de la cité uvale, et aujourd’hui, à l’âge de la (relative) sagesse, il l’observe du haut des coteaux. L’écrivain Jean Songe (à la ville Yannick Bourg), d’un abord affable et discret, manie pourtant une plume à la précision diabolique qui sied si bien au roman noir. Fin lettré, connaisseur hors pair de la musique anglo-américaine, l’homme fut également un agitateur culturel au sein de la Zone d’Activités Poétiques (ZAP) qu’il avait initiée il y a quelques années avec quelques amis artistes du cru, et un redoutable bluesman frapadingue avec son groupe Le Vieux Flingue. Continuer la lecture de Moissac. « Sodexo la gloutonne » : Jean Songe met les pieds dans le plat in DDM

Présidentielle. En Auvergne, Fabien Roussel défend une ruralité heureuse

Le candidat communiste à la présidentielle a choisi la petite ville de Billom, dans le Puy-de-Dôme, et les thèmes de l’agriculture, de l’alimentation et des ruralités pour lancer une campagne de six rencontres-débats avec les électeurs.

Large sourire, Fabien Roussel est satisfait. Il ne s’en cache pas : « Je suis heureux d’être en Auvergne, et d’avoir choisi pour premiers thèmes l’agriculture, l’alimentation, les ruralités. » « Cela a surpris certains qui ne voient les communistes qu’à la sortie des usines », a-t-il ironisé ce mercredi. La première des « Rencontre des jours heureux » est indéniablement un succès. Une salle comble. Attentive. Soigneusement agencée pour accueillir les questions des participants, des internautes et des citoyens filmés le matin même dans les allées du Sommet de l’élevage. Et au final, des militants confiants dans leur candidat que beaucoup découvrent dans l’exercice. Continuer la lecture de Présidentielle. En Auvergne, Fabien Roussel défend une ruralité heureuse

Castelsarrasin. Secours populaire : une équipe de direction renouvelée in DDM

Une réunion présidée par la trésorière Ghislaine Roussy-Mayanobe./ Photo DDM Marc Zulian

Le Secours Populaire a tenu son assemblée générale au terme de deux années marquées par la crise sanitaire.

Le comité du Secours Populaire de Castelsarrasin a tenu son assemblée générale à la salle Marcelle-Duba. Une réunion organisée dans des circonstances exceptionnelles. Après les démissions successives de plusieurs membres du bureau, dont le secrétaire général Julien Sueres, c’est la trésorière du comité Ghislaine Roussy-Mayanobe qui a présidé l’assemblée générale, en présence de Nadia Betin, adjointe aux affaires sociales, Driss Khaïza, directeur du CCAS et Francette Noël Frauciel, responsable du Secours Populaire du Tarn-et-Garonne. Continuer la lecture de Castelsarrasin. Secours populaire : une équipe de direction renouvelée in DDM

Moissac: schisme dans le populisme extrême droitiste

Les démocrates de Castelsarrasin-Moissac s’interrogent à juste raison sur la flambée d’affichage autour de la candidature de M. Zemmour. En effet, dans un partage des taches à priori concerté, à Moissac les affiches de Mme Le Pen, à Castelsarrasin les affiches Zemmour pullulent. Nous pensions qu’il s’agissaient des mêmes à la manœuvre…. Que nenni mes amis-es, et c’est M. Lopez qui nous éclaire de sa science politicienne sur les dessous de cet engouement soudain pour nos panneaux d’affichage…

Que ceux qui croient encore que M. Lopez  n’est pas de la droite la plus extrême, lèvent le doigt!

Ainsi, M. Lopez, dans la droite (extrême) ligne de sa maitresse à penser, Marion Maréchal Le Pen, vient de basculer dans le camp des Zemmouriens tout en animant par ailleurs les réseaux lepénistes locaux. Il devient donc le chef de file de l’extrême droite sur notre département après avoir évincé M. Viallon qui lui faisait de l’ombre. Et pour satisfaire son ambition, il joue sur les 2 tableaux du populisme nationaliste: un coup Le Pen, un coup Zemmour. Continuer la lecture de Moissac: schisme dans le populisme extrême droitiste