Sorcière, de la créature maléfique à l’icône féministe

De Salem à Édimbourg, le mouvement de réhabilitation de milliers de femmes persécutées et exécutées pour « sorcellerie », entre les XVe et XVIIIe siècles, marque des points. Quelle est la modernité de ce combat ? Analyse

 

Elle était la dernière des sorcières de Salem… non graciée. Son nom s’était perdu dans les limbes de l’Histoire. Ce sont des collégiens qui l’en ont sorti. Célibataire sans enfant, Elizabeth Johnson avait 22 ans lorsqu’elle fut dénoncée comme sorcière et condamnée à la pendaison. Sans être acquittée, elle a échappé à la potence après que le gouverneur royal de l’État du Massachusetts, un certain William Phips, a mis fin à l’hystérie presque générale qui saisissait, à la fin du XVIIe siècle, cette partie de la Nouvelle-­Angleterre.

Une « pécheresse » examinée lors de son procès, « créature » forcément insensible à la douleur puisque protégée par le diable. La puissante vague misogyne a culminé en Europe au XVIIe siècle.

En mai dernier, Elizabeth Johnson a finalement été réhabilitée par le Sénat de ce même État, trois cent vingt-neuf ans après sa condamnation. Au cours d’une recherche sur les fameuses « sorcières de Salem », des collégiens de North ­Andover ont découvert son nom, un an plus tôt. Ils n’ont dès lors cessé de plaider sa cause auprès des élus de l’État, qui ont pris l’affaire en mains, comme un point final au mouvement de vérité et de réhabilitation concernant cette tache – une de plus – dans l’histoire des États-Unis. En quelques mois, 20 personnes de Salem et des villages environnants avaient été tuées (19 par pendaison et une par lapidation) et des centaines accusées durant une grande crise puritaine. Continuer la lecture de Sorcière, de la créature maléfique à l’icône féministe

Jour du dépassement : comment faire reculer cette date fatidique

Ce jeudi 28 juillet marque le « jour du dépassement », date à laquelle l’humanité a épuisé les ressources que la Terre peut fournir en un an, selon les calculs du Global Footprint Network. L’ONG américaine et le WWF pointent du doigt un système agricole et alimentaire insoutenable.

 « Nous consommons autant que 1,75 planète. » Laetitia Mailhes, Global Footprint Network. © A. Francisco Nunes Ribeiro / EyeEm

« Nous consommons autant que 1,75 planète. » Laetitia Mailhes, Global Footprint Network. © A. Francisco Nunes Ribeiro / EyeEm

Selon l’ONG Global Footprint Network, nous atteignons ce jeudi 28 juillet le « jour du dépassement », date où l’humanité a épuisé l’ensemble des ressources biologiques que la Terre peut générer en un an. Depuis les années 1970, cette date grignote toujours plus de jours – à l’exception d’années de crise comme 2020. En 2021, ce jour intervenait le 29 juillet, soit un jour plus tard.

En 2002, il y a vingt ans, il tombait deux mois plus tard. Laetitia Mailhes, porte-parole du Global Footprint Network, explique : « Nous consommons autant que 1,75 planète. On produit plus de CO2 que ce que les forêts et les océans ne peuvent absorber. On prélève plus de poissons que ce que le système aquatique peut régénérer, et on déforeste plus qu’on plante. » Nous entamons alors jusqu’à la fin de l’année les ressources du capital naturel de la planète. Continuer la lecture de Jour du dépassement : comment faire reculer cette date fatidique

Total, Engie, Stellantis, LVMH… Le filon inexploité des superprofits des crises

Alors que Total et Stellantis viennent d’annoncer des résultats record, responsables politiques et ONG appellent à ponctionner les profits indus des multinationales.

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CREDIT PHOTO/AGENCE Julia ZIMMERMANN/LAIF-REA

 

Il parait que les arbres ne grimpent pas jusqu’au ciel. Mais on se demande si, à ce rythme, les grands groupes ne finiront pas par faire mentir le proverbe. Total vient d’annoncer 18,5 milliards d’euros de bénéfices au premier semestre, en hausse de 200 % par rapport au premier semestre 2021. Cette envolée doit tout à la flambée délirante des cours du pétrole et à celle des marges de raffinage, multipliées par 13,3 en un an, conflit ukrainien oblige.

Cette semaine, d’autres groupes ont publié des résultats semestriels canon, parmi lesquels le géant du luxe LVMH (6,5 milliards d’euros de bénéfices, + 23 %). Voilà qui relance le débat sur la taxation des « profiteurs de crise », ces entreprises réalisant des résultats faramineux en pleine tempête géopolitique.

La proposition d’une taxe exceptionnelle de 25 % Continuer la lecture de Total, Engie, Stellantis, LVMH… Le filon inexploité des superprofits des crises

L’apartheid israélien dénoncé à l’Assemblée

Parlement Un texte soutenu par le groupe PCF et des élus insoumis, socialistes et écologistes vise à obtenir de la France la dénonciation du régime de ségrégation dont est victime le peuple palestinien.

AFP

Plusieurs députés de gauche, à l’initiative des communistes, font de la question palestinienne une priorité. L’élu PCF Jean-Paul Lecoq, par ailleurs vice-président de la commission des Affaires étrangères, a déposé, mi-juillet, une proposition de résolution « condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien » et invitant la France à « reconnaître la Palestine comme un État souverain et autonome », comme l’ont déjà fait 139 pays. Ce texte a été cosigné par 38 députés issus des quatre groupes de gauche. En décembre 2014, déjà, les représentants de la nation avaient majoritairement invité, sans succès, le « gouvernement français à reconnaître l’État de Palestine en vue d’obtenir un règlement définitif du conflit ». Continuer la lecture de L’apartheid israélien dénoncé à l’Assemblée

Du réchauffement climatique à la spéculation sur l’alimentation

Nous avons évoqué hier les risques de voir chuter fortement la production agricole en France du fait de la sécheresse et des journées de canicule qui détruisent des cultures. Mais c’est aussi le cas un peu partout dans le monde et on annonce déjà une baisse des rendements céréaliers. De quoi faire repartir la spéculation au détriment de la souveraineté des peuples, y compris en France et dans les autres pays membres de l’Union européenne.

Les journées chaudes de la fin du printemps et du début de l’été ont fait prendre trois semaines d’avance aux moissons de cet été en France par rapport aux dates moyennes des années précédentes. Dans les pays membres de l’Union européenne, la récolte céréalière de 2022 est annoncée en baisse 4,4 % sur 2021 pour totaliser 227 millions de tonnes, selon des prévisions faites au début du mois de juillet par le COPA-COGECA. En France, on annonce des rendements hétérogènes selon les régions et la nature des sols, qu’il s’agisse du blé, de l’orge d’hiver ou du colza. Le rendement moyen est actuellement estimé à 69,5 quintaux l’hectare pour le blé tendre, soit une baisse de 2 % comparé à 2021 et de 3 % sur la moyenne des dix dernières années. Continuer la lecture de Du réchauffement climatique à la spéculation sur l’alimentation

Agriculture, tourisme, énergie… Les désastres d’un été à sec

Baisse de production hydroélectrique, rendements inquiétants pour les cultures, économie du tourisme en difficulté… Dans les Alpes, la diminution de la ressource en eau s’annonce particulièrement menaçante.

Le lac de Castillon, dans les gorges du Verdon, a reculé de plusieurs mètres, impactant le secteur du tourisme. Sébastien Nogier/EPA/MaxPPP

Le lac de Castillon, dans les gorges du Verdon, a reculé de plusieurs mètres, impactant le secteur du tourisme. Sébastien Nogier/EPA/MaxPPP

Le lac de Serre-Ponçon, plus grande retenue d’eau artificielle de France, situé dans les Hautes-Alpes, devait atteindre le 30 juin son niveau d’eau optimal, nécessaire pour lancer une saison touristique fortement attendue après deux années de Covid. Mais, à cette date, la cote mesurée affichait déjà un déficit de… 9 mètres. En août, les prévisions annoncent – 15 mètres.

Pour Philippe Rossello, géographe spécialiste du climat et coordinateur du Grec-Sud (Groupe régional d’experts sur le climat et le changement climatique en région Sud-Paca), la situation est critique. « La machine de la sécheresse est en marche depuis maintenant une dizaine de mois, explique-t-il. En principe, les recharges des nappes phréatiques et des cours d’eau se font au cours de l’automne et de l’hiver, avec la neige et les pluies. Or, depuis septembre, on n’a que des mois déficitaires en termes de précipitations ou, au mieux, conformes à la normale. » Continuer la lecture de Agriculture, tourisme, énergie… Les désastres d’un été à sec

Le plaidoyer anti-impérialiste d’Ernesto Che Guevara

Le 11 décembre 1964, en pleine guerre froide, le commandant de la révolution cubaine dénonce à la tribune des Nations unies l’interventionnisme des puissances occidentales, frein à toute « coexistence pacifique des peuples ».

Dans son adresse à l’ONU, le « Che » se fait le porte-voix des pays non alignés. © Globe Photos/Zumapress/Bridgeman Images

Dans son adresse à l’ONU, le « Che » se fait le porte-voix des pays non alignés. © Globe Photos/Zumapress/Bridgeman Images

Vêtu de son treillis vert olive, Ernesto Guevara est à la tribune de l’Assemblée des Nations unies. Ce 11 décembre 1964, le palais de verre de New York tremble. Rarement un dirigeant s’est livré dans cette enceinte à un tel réquisitoire contre l’impérialisme des puissances occidentales, particulièrement des États-Unis qui ensanglante l’Amérique latine, le Congo de feu Patrice Lumumba, le Vietnam, etc.

Le commandant de la révolution cubaine en sait quelque chose. Depuis l’avènement de la révolution en 1959, Cuba, autrefois bordel de la mafia et des États-Unis, est la cible d’attaques de la Maison-Blanche, comme l’illustre l’invasion de la baie des Cochons, en 1961, par des mercenaires entraînés par la CIA. Depuis, le pays est soumis à un terrible blocus toujours en vigueur. En 1962 encore, la Grande Île a été le point névralgique de la guerre froide avec la crise des missiles. Continuer la lecture de Le plaidoyer anti-impérialiste d’Ernesto Che Guevara

Consentement : à quand une France à l’heure espagnole ?

Violences sexuelles Résolument avant-gardiste, le projet de loi espagnol « Solo si es si » (seul un oui est un oui) place la parole de la femme au cœur du système juridique. Malgré des déclarations de façade, la France rechigne à lui emboîter le pas.

REUTERS

« Seul un oui est un oui. » Un cri plus qu’une phrase. Un cri devenu slogan en Espagne et bientôt loi. Contre les violences sexuelles et machistes, le texte législatif surnommé « Solo si es si » est révolutionnaire. Il veut imposer un changement de paradigme et édicter une nouvelle définition du consentement. Après deux ans de consultations et d’auditions d’expertes, de batailles contre l’opposition, ce projet de loi organique pour « la garantie intégrale de la liberté sexuelle » a été voté en première lecture à l’Assemblée le 26 mai et se trouve actuellement en débat au Sénat. Continuer la lecture de Consentement : à quand une France à l’heure espagnole ?

La mort d’Yves Coppens, passeur de préhistoire

Le célèbre paléoanthropologue est mort ce jour, à l’âge de 87 ans. Nous republions un entretien réalisé pour la sortie de ses Mémoires, en 2018.

Célèbre pour avoir découvert plusieurs fossiles d’hominidés dont l’australopithèque Lucy, le paléoanthropologue Yves Coppens a publié, à 83 ans, ses mémoires, dans lesquels il retrace son parcours et raconte la naissance de sa passion pour l’archéologie. L’occasion pour ce passionné de nous recevoir chez lui et de nous offrir, avec la générosité qui le caractérise, un précieux entretien sur les origines et l’évolution de l’homme.

23 mars 2018, Paris, Yves Coppens, mémoires "Origines de l'Homme, origines d'un Homme"

23 mars 2018, Paris, Yves Coppens, mémoires « Origines de l’Homme, origines d’un Homme »

Vos mémoires (1) paraissent l’année où nous fêtons les 150 ans de la découverte de l’homme de Cro-Magnon en France… Comment cet anniversaire résonne-t-il pour vous ?

Yves Coppens Il est intéressant de mettre en perspective l’histoire de la découverte de Cro-Magnon avec celle de Neandertal : avant la mise au jour du premier fossile de Cro-Magnon en 1868 dans un petit abri sous roche en Dordogne, des restes de Neandertal avaient été retrouvés en 1829 en Belgique, en 1848 à Gibraltar et en 1856 en Allemagne. Or, pétri de toute la tradition chrétienne en Europe, le grand public et les scientifiques étaient décontenancés par cet ancêtre qu’ils ne trouvaient pas « beau », au sens esthétique du XIXe siècle. Alors quand le préhistorien français Louis Lartet a découvert Cro-Magnon qui offrait, lui, l’« élégance » des caractères anatomiques que tout un chacun espérait d’un ancêtre (grand front, beau menton, plus de 1 600 cm3 de capacité endocrânienne), cela a été un soulagement et un bonheur ! Continuer la lecture de La mort d’Yves Coppens, passeur de préhistoire

Est-ce qu’en répétant les erreurs on finit par faire du neuf? par D. Bleitracht

NDLR de MAC: un texte incisif et polémique qui replace le débat dans la perspective d’une construction d’un parti communiste plus fort et p^lmus à même de répondre au x défis de ce siècle. Un siècle après le congrès de Tours, à nous de montrer notre volonté!

Quand on s’étonnait de la jeunesse d’esprit d’Oscar Wilde celui-ci répondait avec son goût très particulier du sarcasme : “pour rester jeune c’est très simple il suffit de recommencer les mêmes erreurs. ”

Oserais-je vous avouer que hier après avoir écrit un texte, un de plus, sur la perspective offerte par l’élection législative, et ce que devrait faire le PCF, mon malheureux pays, je me suis demandé si en proférant de tels conseils, je ne cherchais pas à poursuivre une illusoire jeunesse en réitérant l’erreur de donner des conseils à des gens qui non seulement ne les suivraient pas, mais qui depuis plus de trente ans me font entendre par tous les moyens à leur disposition qu’ils en ont rien à foutre de moi et de mes recommandations. Quand je dis moi, lecteur mon ami, mon frère, pense que nous sommes quelques uns dans le même cas.

Soyons lucides : nous sommes devant une bouffonnerie avec cette FRANCE ingouvernable et il suffit de contempler ce schéma pour en avoir conscience. S’acharner sur ce que l’on peut attendre d’un tel résultat et croire que c’est de là que viendra la solution est stupide. Comme d’ailleurs est stupide le fait de croire en l’UE alors même qu’elle s’identifie à un OTAN de plus en plus en état de coma dépassé à force de n’être que la volonté des USA. Dans les deux cas, ne pas tenter de voir l’ampleur du champ politique est donc la première erreur et je n’ai pas vu grand monde s’en abstraire réellement. Ce refus de comprendre la période historique pour des raisons que l’on pense opportunistes est aussi une manière d’ignorer le quotidien de la majorité des Français comme de la plupart des peuples. Continuer la lecture de Est-ce qu’en répétant les erreurs on finit par faire du neuf? par D. Bleitracht