En pleine crise agricole et alors que se profilent les élections européennes, les différentes forces de gauche divergent sur la nécessité et la méthode visant à reconquérir les zones rurales, où elles sont en déficit de popularité.
Où est la gauche ? Dans les zones rurales, soit l’ensemble des communes peu ou très peu denses selon l’Insee et qui rassemblent 33 % de la population, elle ne semble plus vraiment dans les cœurs. Un désamour illustré lors des dernières élections législatives, en 2022. Sur 225 circonscriptions comprenant une sous-préfecture, la gauche, alors sous l’étiquette de la Nupes, n’en a remporté que 39, contre 120 en 2012.
Pendant ce temps, le Rassemblement national (RN) gagne du terrain, remportant dans ce type de territoires 44 sièges, dont certains emblématiques. Dans l’Aude, toutes les circonscriptions, entièrement socialistes entre 1997 et 2017, sont désormais aux mains du RN.
Un jour après la cohue autour d’Emmanuel Macron, Jordan Bardella a, lui, pu s’offrir un bain de foule. Une opération de communication rodée qui fait des convertis, même si de nombreux agriculteurs ne sont pas dupes.
Terrifiant retournement de situation. Voyant l’attroupement autour de Jordan Bardella, Jean-Michel, éleveur berrichon de 55 ans, essaie d’atteindre les oreilles du président du Rassemblement national (RN) : « Facho ! Tu n’as rien à faire au salon ». Aussitôt, une dizaine de personnes, badauds et paysans, lui intiment de « dégager » :« C’est à toi de partir, gauchiste ! » « Tu dis n’importe quoi, va-t’en. »
Avec la montée de l’inflation et les allégements de cotisations sociales, le pourcentage de salariés payés au salaire minimum a atteint les 17,3 %. Du jamais-vu depuis plus de trente ans.
Après plusieurs semaines de mobilisation des agriculteurs, quel bilan tirer des annonces gouvernementales ?
Les mesures présentées par le Premier ministre s’inscrivent dans la continuité des choix libéraux : un énième plan d’urgence pour l’agriculture, qui ressemble à tous les plans précédents. Le disque est rayé. Pourquoi ? Parce que le pouvoir se refuse à prendre des mesures fortes sur les enjeux structurels. Les revendications des agriculteurs portaient d’abord sur la question des prix d’achat et sur celle des protections face aux productions importées. C’est justement là où le pouvoir reste l’arme au pied.
Une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques, consacrée au pouvoir d’achat en France entre 2019 et 2023, révèle la faible contribution du salaire à l’amélioration du niveau de vie. L’économiste Mathieu Plane, l’un des auteurs de cette analyse, dévoile ici les ressorts principaux de cette dynamique, pendant les deux chocs massifs du Covid et de la crise inflationniste.
Quels sont les ressorts qui influent sur le pouvoir d’achat ? C’est l’une des questions à laquelle l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFSE) tente de répondre, à travers son étude publiée le 15 février. Intitulée « De la crise Covid au choc inflationniste : une analyse macro/micro du pouvoir d’achat en France », elle confronte l’analyse macro-économique à celle des situations individuelles, démontant au passage nombre d’idées reçues sur la « valeur travail », en révélant la part dérisoire du salaire dans l’amélioration du niveau de vie entre 2019 et 2023. Continuer la lecture de Pouvoir d’achat : « le travail ne paie pas », alerte l’économiste Mathieu Plane
Depuis la crise agricole, le premier ministre s’agite pour assurer de sa compréhension des problématiques du secteur. Une stratégie éculée : occuper l’espace et faire du bruit pour créer l’illusion de l’action.
L’agriculture européenne et française doit nourrir près de 450 millions d’habitants de l’Union européenne et 68 millions de Français. Mais le modèle agricole actuel est en échec : il ne permet ni de garantir un revenu décent aux agriculteurs, ni d’assurer la souveraineté alimentaire de la France, ni de répondre au défi écologique !
Le constat est simple et accablant : les agriculteurs et agricultrices travaillent pour nous nourrir, mais nombre d’entre eux n’arrivent plus à vivre de leur travail ! Les revenus agricoles sont très bas, autour de 1 100 euros en moyenne nationale, mais avec des disparités très fortes en fonction des productions et des structures. 10 % des éleveurs gagnent moins de 800 euros par mois et 25 % sont sous le seuil de pauvreté. 20 % des agriculteurs ne dégagent quasiment aucun revenu. Rappelons que pour obtenir des revenus aussi faibles, leur temps de travail dépasse souvent 50 à 60 heures par semaine. Continuer la lecture de Un pacte d’avenir avec tous les agriculteurs de notre pays – 15 propositions pour répondre à la crise agricole (PCF)
Pour la Confédération paysanne comme pour le Modef, les trop faibles revenus des agriculteurs sont au cœur du mal-être paysan. Ces syndicats progressistes préconisent de réglementer fortement les marchés. Ce à quoi se refuse le gouvernement.
Farmers with tractors, on the highway during a farmers protest on the border of Belgium and France, between Aubange and Mont-Saint-Martin, on January 29, 2024. Farmers protests across Europe are growing as they demand better conditions to grow produce and maintain a proper income. (Photo by JULIEN WARNAND / Belga / AFP) / Belgium OUT
Pour répondre à la colère paysanne, Gabriel Attal ne manquait pas de propositions. D’un côté : la centaine de changements souhaités et formulés par le tandem majoritaire FNSEA-Jeunes Agriculteurs, lancé dans une course au moins-disant social et environnemental, avec, à leur droite, la Coordination rurale. De l’autre : côté progressiste, 45 mesures à prendre d’urgence listées par le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), ainsi que la plateforme revendicative de la Confédération paysanne. En choisissant de faire un peu plaisir aux premiers sans écouter les seconds, le nouveau locataire de Matignon s’est mis à dos tout le monde. Continuer la lecture de Crise agricole : les vraies solutions pour en sortir + Vidéo
Une délégation menée par Fabien Roussel et composée de travailleurs a été reçue, samedi, par le cabinet de Gabriel Attal. Le secrétaire national du PCF était porteur de témoignages de personnes frappées par la vie chère.
Samedi 3 février en début d’après-midi, Fabien Roussel et la délégation qui l’accompagnait sortent de l’Hôtel de Matignon. Avec une annonce : le cabinet du premier ministre les a informés qu’un rapport rédigé par des économistes concernant le niveau des salaires en France serait remis d’ici l’été.
Un peu plus tôt, le secrétaire national du PCF, accompagné d’une délégation de salariés, de la tête de liste communiste aux élections européennes, Léon Deffontaines, et de deux sénateurs de son parti, Ian Brossat et Silvana Silvani, était reçu à Matignon afin de remettre une pétition contre la vie chère, et des milliers de fiches de paye reçues dans le cadre de l’opération « vérité sur les salaires ».
« Nous avons le sentiment que le gouvernement n’entend que de son oreille droite » dénonçait Fabien Roussel devant 200 personnes rassemblées à quelques pas du siège du gouvernement. « Nous voulons donc lui montrer la vraie vie » en lui présentant les fiches de paye recueillie par les communistes.
À ses côtés, Claudine, agente hospitalière, Alix, cuisinier dans la restauration collective, Lamia, salariée à Monoprix. Le dirigeant communiste évoque la retraite de Claudine. « Elle a attendu ses 67 ans pour partir, et bénéficier d’une pension à 1 400 euros. Si elle avait fait valoir ses droits à 62 ans, elle n’aurait perçu que 960 euros par mois… ».
Alix lui, travaille depuis 16 ans en tant que « chef de partie », cuisinier confirmé. Son salaire s’élève en moyenne à 1 600 euros par mois. « Je me fais rattraper petit à petit par le SMIC » explique le jeune homme. « Je travaille dans un métier en tension. Du coup, les patrons proposent des salaires attractifs pour embaucher du personnel. Et je me retrouve moins payé que des nouveaux qui viennent d’être embauchés ».
Des mots sévères à la sortie de la réunion
Ce phénomène de « Smicardisation » devient de plus en plus problématique avec l’inflation. Le salaire minimum, ainsi que le rappelle Fabien Roussel, a augmenté de 12 % en deux ans grâce à la loi. Ce n’est pas le cas des revenus supérieurs. « Nous allons demander une conférence sociale au premier ministre », annonce-t-il avant de se diriger à Matignon. « Il faut que l’ensemble des salaires soient indexés sur l’inflation, et augmentent de 12 % ».
D’autres salariés sont encore plus pénalisés dans leur évolution de carrière. En charge de la commission du PCF sur les droits des personnes handicapées, Fatima Khallouk explique que les salariés en situation de handicap et bénéficiaires de l’AAH ne peuvent cumuler cette ressource au-delà d’un travail à mi-temps. « L’ancienneté et le handicap sont les premiers motifs de discrimination » dénonce-t-elle. Candidate sur la liste conduite par Léon Deffontaines, Sigrid Gérardin met l’accent sur les inégalités salariales entre hommes et femmes, et donne rendez-vous dans la rue le 8 mars prochain.
Si la délégation ne se faisait guère d’illusion sur la réponse du gouvernement, Fabien Roussel avait des mots sévères à la sortie de la réunion, malgré l’annonce d’un rapport pour cet été. « Ça veut dire que dans les 6 à 8 mois qui viennent, il ne se passera rien. C’est ce que je retiens de ce rendez-vous, et je le regrette ».
« Qu’il agisse au moins sur les factures ! » lance à ses côtés Léon Deffontaines, en faisant allusion à la hausse des factures d’électricité décidée par le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire. « Nous écrirons des propositions que nous remettrons à nouveau à Matignon », promet Fabien Roussel, qui entend « démontrer que c’est le capital qui coûte cher et empêche d’augmenter les salaires ».
Pour le Modef, des contrôles annoncé par Bruno Le Maire ne suffiront pas. atricia Huchot-Boissier/ABACAPRESS.COM
Dès les annonces de Gabriel Attal égrainées jeudi, Pierre Thomas, président du Mouvement de défense des exploitations familiales (Modef), avait donné le ton. « Ces quelques mesures ne changent rien sur le fond. La crise que nous connaissons va donc se poursuivre. On continuera donc les actions. De toute façon, nous savons que la bataille sera longue à mener pour changer de système agricole. » Continuer la lecture de Agriculture : le Modef appelle à poursuivre les mobilisations